Type de document
Rapports de recherche scientifique
Année de publication
2019
Langue
Français
Résumé
Dans le secteur de la construction, l’exposition professionnelle à divers contaminants tels que l’amiante, la silice cristalline et les moisissures est présente dans plusieurs métiers. Dans ces milieux, lorsque le contrôle à la source et les mesures administratives et d’ingénierie s’avèrent insuffisants, le port d’un appareil de protection respiratoire (APR) est essentiel pour réduire les risques d’exposition aux contaminants aéroportés. Dans certaines situations de travail et de températures ambiantes contraignantes, le port d’un APR pourrait augmenter la pénibilité des tâches, poussant les travailleurs à vouloir le retirer, alors qu’ils sont toujours exposés à certains contaminants. Cette étude avait comme objectif de quantifier les contraintes physiologiques, physiques et perceptivomotrices associées au port d’APR de type demi-masque avec filtre P100 selon la température et l’humidité relative ambiante lorsqu’un effort physique est exigé.
L’étude comportait trois volets. Dans les deux premiers volets, des essais avec et sans le port d’un APR de type demi-masque avec filtre P100 ont été réalisés avec huit sujets masculins lors de tests d’effort progressif (30 à 80 % du coût cardiaque relatif) sur un tapis roulant, dans une chambre à environnement contrôlé. Pour le volet 1, les participants ont réalisé les essais dans trois conditions de température ambiante (23°, 29° et 35 °C) à une humidité relative constante à 50 %. Pour le volet 2, les participants ont réalisé les essais dans trois conditions d’humidité relative ambiante (30 %, 50 %, 80 %) à une température de 29 °C. Pour le volet 3, quatre modèles différents d’APR de type demi-masque avec filtre P100, parmi les plus utilisés dans le secteur de la construction au Québec, ont été évalués dans des conditions ambiantes contrôlées (température à 29 °C et 50 % d’humidité relative).
Lors des évaluations, des tâches perceptivomotrices ont été réalisées avant, pendant et après les tests sur le tapis roulant. Plusieurs variables physiologiques et liées à l’utilisation de l’APR ont été mesurées : les fréquences cardiaque et respiratoire, les concentrations d’oxygène et de dioxyde de carbone à l’intérieur de l’APR, la saturation cérébrale en oxygène, la température à l’intérieur de l’APR ainsi que la température corporelle interne. Des échelles de perception psychophysique ont été utilisées pour évaluer la perception de l’effort lors des tests sur le tapis roulant. Lors du volet 3, l’inconfort causé par le port prolongé des quatre modèles d’APR a aussi été évalué sur une période de huit heures, à l’aide d’échelles visuelles analogues.
Les résultats ont montré que, outre la température de l’air inspiré à l’intérieur de l’APR, l’augmentation de la température ambiante, à humidité relative constante, ne semble pas causer d’effet d’interaction avec le port de l’APR. Le port de l’APR provoque une augmentation de la perception psychophysique de l’effort et cette augmentation demeure comparable pour les trois températures étudiées.
Dans les conditions d’humidité relative élevées, une augmentation significative de la fréquence cardiaque et de la perception psychophysique de l’effort a été observée pour un effort de même intensité avec le port d’un APR. Comparativement à la température ambiante, l’augmentation de l’humidité relative semble davantage influencer les indices physiologiques lorsqu’un APR est porté.
Les résultats des deux premiers volets laissent voir que les concentrations en oxygène et en dioxyde de carbone à l’intérieur de l’APR sont respectivement inférieures et supérieures aux concentrations que l’on retrouve dans l’air ambiant. L’augmentation de la fréquence respiratoire semble permettre d’augmenter la ventilation pulmonaire afin de renouveler l’air à l’intérieur de l’APR. Ces changements respiratoires favorisent probablement le maintien des niveaux de concentration de ces gaz dans l’APR malgré l’augmentation de l’effort physique.
Les résultats du troisième volet suggèrent que les types de filtre peuvent avoir un effet mineur sur certaines variables physiologiques. En comparant les modèles de types pancake et coque rigide, les résultats montrent des différences significatives, quoique légères, sur les plans de la perception psychophysique de l’effort, de la fréquence cardiaque, de l’oxymétrie cérébrale, de la température corporelle interne et de la pression téléexpiratoire en CO2. Le port des APR durant une journée complète a montré que les quatre modèles d’APR causaient des inconforts dans la région nasale, bien que légèrement moindres pour les modèles en silicone. De manière générale cependant, le fait que les APR soient constitués de silicone ne semble pas garantir un confort supérieur marqué pour les autres régions du visage des participants.
Les résultats de cette étude réalisée en situation contrôlée démontrent que certaines conditions environnementales peuvent affecter les paramètres physiologiques et causer des sensations d’inconfort avec un APR. L’augmentation de l’effort n’a pas amplifié les effets mesurés avec le port de l’APR. À l’inverse, l’humidité relative semble être le seul facteur qui amplifie l’effort perçu par les participants et leur fréquence cardiaque avec le port de l’APR. D’autres études sont nécessaires pour mieux comprendre l’effet de cette variable dans différentes conditions d’utilisation des APR se rapprochant de celles rencontrées en milieu de travail.
Abstract
A number of construction trades are exposed to contaminants such as asbestos, crystalline silica and moulds. In these working environments, when control at source and administrative and engineering measures prove inadequate, the use of a respiratory protective device (RPD) is essential to reduce the risks of exposure to airborne contaminants. In some work situations with high ambient temperatures, however, wearing an RPD could make tasks harder to perform, causing workers to want to take them off, even when they are still exposed to contaminants. The goal of this study was to quantify the physiological, physical and perceptual-motor constraints associated with wearing a P100 half-facepiece RPD, depending on the temperature and relative humidity, when physical exertion is required.
There were three parts to the study. In the first two parts, progressive effort tests (30% to 80% of relative cardiac cost) were run with and without P100 half-facepiece RPDs on eight male subjects on a treadmill in a controlled environment chamber. In part 1, the participants did the tests in three ambient temperature conditions (23°C, 29°C and 35°C) at a constant relative humidity of 50%. In part 2, the participants did the tests under three ambient relative humidity conditions (30%, 50% and 80%) at a constant temperature of 29°C. In part 3, four different models of P100 filter half-facepiece RPDs, among the most commonly used in the Quebec construction industry, were assessed under controlled ambient conditions (temperature of 29°C and relative humidity of 50%).
During the assessments, perceptual-motor tasks were performed before, during and after the treadmill tests. A number of physiological variables related to RPD use were measured: heart and respiratory rates, oxygen and carbon dioxide concentrations inside the RPD, brain oxygen saturation, temperature inside the RPD and internal body temperature. Psychophysical perception scales were used to assess perceived exertion during treadmill tests. In part 3, the discomfort due to extended wearing of the four models of RPD was also assessed over a period of eight hours, by means of visual analogue scales.
The results showed that, aside from the temperature of the air inhaled inside the RPD, an increase in ambient temperature, at constant relative humidity, does not seem to cause any effect of interaction with the wearing of the RPD. The use of an RPD does cause an increase in the psychophysical perception of effort, however, and this increase is comparable for the three temperature levels examined.
Under high relative humidity conditions, a significant increase in heart rate and psychophysical perception of effort was observed for an effort of the same intensity while wearing an RPD. An increase in relative humidity seems to have a greater effect on physiological indices than does ambient temperature when an RPD is being worn.
The results of the first two parts show that oxygen and carbon dioxide concentrations inside the RPD are, respectively, lower than and greater than the concentrations found in ambient air. The increase in respiratory rate seems to enable an increase in pulmonary ventilation to renew the air inside the RPD. These respiratory changes probably help maintain the concentrations of these gases inside the RPD despite the increase in physical exertion.
The results of the third part of the study suggest that the filter types used can have a minor effect on certain physiological variables. When the pancake and rigid shell models are compared, the results reveal significant, though small, differences with respect to psychophysical perception of effort, heart rate, brain oximetry, internal body temperature and end-expiratory CO2 pressure. Wearing a respirator for an entire day caused discomfort around the nose for all four models of RPD, although it was slightly less for the silicone models. Generally speaking, however, the silicone RPDs were no more comfortable to wear than the other models when it came to other parts of the face, according to the participants.
The results of this study, conducted in a controlled situation, show that certain environmental conditions can affect physiological parameters and cause discomfort when wearing an RPD. An increase in effort did not amplify the effects measured when wearing an RPD. Conversely, relative humidity seems to be the only factor that amplifies the exertion perceived by the participants and their heart rate when wearing an RPD. Other studies will be necessary to gain a better understanding of the effect of this variable under different conditions of RPD use similar to those found in the workplace.
ISBN
9782897970765
Mots-clés
Équipement de protection respiratoire, Respirator, Évaluation du confort, Comfort assessment, Humidité, Humidity, Poussière, Dust, Évaluation de la charge thermique, Heat stress assessment, Détermination expérimentale, Experimental determination, Essai du matériel, Equipment testing, Méthode de travail et sécurité, Safe working method, Effet thermique, Thermal effect, Québec
Numéro de projet IRSST
2015-0033
Numéro de publication IRSST
R-1069
Citation recommandée
Marchand, D., Gauvin, C., Tuduri, L., Charbonneau, S. et Zovilé, I. (2019). Appareil de protection respiratoire de type P100 : les contraintes liées à l'intensité du travail et aux conditions ambiantes (Rapport n° R-1069). IRSST.