Type de document

Rapports de recherche scientifique

Année de publication

2017

Langue

Français

Résumé

Le nombre d’accidents du travail a diminué au cours des 30 dernières années au Québec. Néanmoins, il y a toujours un travailleur qui y est blessé ou mutilé toutes les six minutes. Les blessures aux mains ont représenté 14,9 % de l’ensemble des lésions indemnisées par la Commission des normes, de l’équité, de la santé et de la sécurité du travail du Québec (CNESST) en 2012. Cette proportion a atteint 30 % dans certains secteurs d’activité, notamment ceux de l’usinage du métal et de la préparation alimentaire. Le port de gants de protection adaptés au contexte de travail est l’un des moyens pour réduire le risque de blessures aux mains. Des méthodes normalisées permettent de déterminer le niveau de protection des gants, notamment contre la coupure et la perforation. Cependant, ces niveaux de protection sont généralement connus pour des gants neufs seulement et peu d’études ont montré leur évolution temporelle selon les contraintes rencontrées en milieu de travail. Dans de nombreux secteurs d’activité, comme celui de l'usinage du métal, les risques sont souvent multiples et l’exposition aux fluides de coupe peut modifier les propriétés de résistance mécanique des gants. De plus, les gants peuvent parfois être nettoyés afin de prolonger leur durée d'utilisation et de réduire les coûts, sans pour autant que l’on ait déterminé l’impact de ce traitement sur leurs performances.

L’objectif de cette étude était de caractériser l’effet des fluides de coupe sur la résistance mécanique des gants de protection, en conditions contrôlées au laboratoire ainsi qu’en milieu de travail. Pour ce faire, des gants et des contaminants déjà utilisés dans trois secteurs de travail de deux entreprises partenaires de l’étude ont d’abord été choisis. Les effets d’une contamination de ces gants en laboratoire et des traitements de nettoyage, sur la résistance résiduelle des gants à la coupure et à la perforation, ont été évalués avec différents couples gants/contaminants. Ensuite, des tests de gonflement en laboratoire sur différents polymères ont été réalisés afin de déterminer les polymères d’enduction des gants les plus résistants aux fluides de coupe utilisés en usinage du métal. Des tests de gonflement sur deux de ces polymères exposés à des fluides de coupe à différentes températures ont également été effectués pour constater l’effet de la température sur la résistance chimique. Des essais complémentaires de caractérisation des fluides de coupe et l’utilisation des résultats des tests de gonflement ont été analysés selon une régression linéaire multiple. Cette analyse a permis de déterminer les paramètres caractérisant les fluides qui ont un impact significatif sur le gonflement. Finalement, à partir de ces résultats et considérant les secteurs de travail ciblés dans les deux entreprises partenaires de l’étude, des gants pouvant répondre aux besoins des travailleurs en termes de la protection et de la fonctionnalité ont été sélectionnés parmi ceux disponibles sur le marché. Ces « nouveaux » gants ont été testés en milieu de travail dans le cadre d’un programme d’usure des gants. Ce programme a consisté à mesurer la résistance à la coupure et à la perforation des gants usagés après leur utilisation et à comparer ces propriétés à celles des gants neufs, ainsi qu’à vérifier auprès des travailleurs, à l’aide d’un questionnaire, si le choix des gants répondait bien à leurs besoins.

Les essais de gonflement menés sur les polymères ont permis de classer les polymères d’enduction potentiels des gants selon l’ordre décroissant de leur résistance aux fluides de coupe : PVC, Nitrile, Polyuréthane > Néoprène > Butyl, Latex. L’analyse effectuée selon une régression linéaire multiple a permis, d’une part, de démontrer que la densité (ou la constante de viscosité-gravité) du fluide et les paramètres de solubilité des polymères ont un impact significatif sur le gonflement et, d’autre part, de proposer des modèles qui expliquent jusqu’à 74 % de la variance totale du gonflement.

Les résultats des essais de contamination des gants en laboratoire sur différents couples gants/contaminants ont démontré que l’état du gant avait un effet significatif sur sa résistance mécanique, notamment sur la résistance à la perforation. De manière générale, la résistance à la coupure et surtout à la perforation diminue lorsque les gants sont en contact avec un fluide de coupe. Cependant, avec plusieurs des couples gants/contaminants étudiés, l’effet des fluides de coupe sur la résistance mécanique n’a pas été statistiquement significatif. Ces résultats sont compréhensibles dans la mesure où les gants initialement utilisés par les entreprises partenaires sont composés principalement des polymères nitrile ou polyuréthane, ceux-ci ayant démontré les meilleures résistances aux fluides de coupe lors des essais de gonflement en laboratoire. Les résultats des traitements de nettoyage des gants ont mis en évidence des changements de morphologie et de propriétés mécaniques, notamment une décoloration et une légère augmentation de la résistance à la perforation.

Les résultats du programme d’usure des gants en milieu de travail ont montré que l’effet d’une utilisation normale en présence de contaminants est très complexe et différent d’une contamination réalisée en laboratoire. Dans ces milieux de travail, les gants ont subi non seulement l’action des fluides de coupe, mais aussi une usure mécanique associée aux spécificités des activités de travail (parfois inhomogène d’un travailleur à l’autre). Les essais de résistance à la perforation des gants ont montré que le niveau de protection des gants usagés était plus faible que celui des gants neufs. Des changements de morphologie des matériaux de gants ont également été observés, notamment des trous, des traces d’érosion et des déchirures plus ou moins profondes. Ces signes d’usure peuvent être attribués à la dégradation chimique du matériau et/ou à l’usure mécanique durant l’activité de travail. Les résultats obtenus quant à la satisfaction des usagers et leur acceptation des gants testés démontrent qu’il n’existe pas de modèles universels, valables pour toutes les tâches professionnelles et appropriés à tous les types d’environnement de travail. Le port de certains gants peut être largement accepté ou refusé, ou encore faire l’objet d’avis extrêmement partagés parmi les travailleurs.

De manière générale, les données issues des tests de coupure ont présenté des variabilités importantes rendant difficile la détection d’effets, que ce soit pour les gants contaminés en laboratoire, nettoyés ou usés en milieu de travail. Pour utiliser cette propriété dans des études ultérieures, une mise au point de la méthode de coupure et un meilleur contrôle des différentes sources de variabilité devraient être considérés.

Cette étude a permis de formuler des recommandations sur les meilleurs polymères d’enduction pour les gants utilisés dans le secteur de l’usinage du métal et de déterminer quels gants peuvent potentiellement remplacer ceux actuellement utilisés dans les entreprises partenaires de l’étude. Ces travaux ont également favorisé une meilleure compréhension de l’action des fluides de coupe sur le comportement des gants dans différentes conditions d’utilisation.

Abstract

The number of workplace accidents in Quebec has declined over the last 30 years. Nevertheless, a worker is still injured or maimed every six minutes. Hand injuries accounted for 14.9% of all injuries compensated by Quebec’s Commission des normes, de l’équité, de la santé et de la sécurité du travail (CNESST, Labour Standards, Equity, Health and Safety Board) in 2012. The proportion was as high as 30% in some sectors, including metal machining and food preparation. Wearing protective gloves suitable for the work environment is one of the ways to reduce the risk of hand injuries. There are standardized methods for determining the level of protection that gloves afford, especially against cuts and punctures. Still, these levels of protection are generally valid for new gloves only, and little research has focused on how the degree of protection changes over time and according to the stresses to which the gloves are exposed in the workplace. In many areas of activity, like metal machining, there are often many different hazards, and exposure to cutting fluids can alter the mechanical resistance properties of gloves. In addition, gloves can sometimes be cleaned to extend their useful life and reduce costs, but what impact this treatment may have on protection has not been determined.

The objective of this study was to characterize the effect of cutting fluids on the mechanical resistance of protective gloves, under controlled laboratory conditions and in the workplace. To this end, gloves and contaminants already used in three sectors of two companies that were partners in the study were chosen. The effects of contamination of these gloves in the lab and of cleaning treatments on the residual cutting and puncture resistance of the gloves were assessed with different glove/contaminant pairs. Then, inflation tests were conducted in the lab on different polymers to determine which glove coating polymers were the most resistant to the cutting fluids used in metal machining. Inflation tests on two of these polymers exposed to cutting fluids at different temperatures were also carried out to assess the effect of temperature on chemical resistance. Additional characterization testing of the cutting fluids was done, along with multiple linear regression analysis of the inflation test results. Through this analysis, the parameters characterizing the fluids that have a significant impact on inflation were determined. Last, on the basis of these results and considering the sectors targeted in the two partner companies in the study, gloves that could meet workers’ needs in terms of protection and functionality were selected from among those available on the market. These “new” gloves were tested in the workplace as part of a glove wear-and-tear program. The program involved measuring the cutting and puncture resistance of the gloves after use and comparing these properties with those of new gloves, as well as asking workers, by means of a questionnaire, whether the selected gloves did indeed meet their needs.

Based on the results of the inflation tests on the polymers, the potential coating polymers for the gloves were classified by decreasing order of their cutting fluid resistance: PVC, nitrile, polyurethane > neoprene > butyl, latex. The multiple linear regression analysis showed that the density (or viscosity-gravity constant) of the fluid and the solubility parameters of the polymers have a significant impact on inflation; on this basis, models were proposed that explained up to 74% of the total variation in inflation.

The results of the laboratory tests of glove contamination on different glove/contaminant pairs showed that glove condition had a significant effect on a glove’s mechanical resistance, especially its puncture resistance. Generally speaking, cutting, and especially puncture resistance, decline when the gloves are in contact with a cutting fluid. However, with several of the glove/contaminant pairs tested, the effect of the cutting fluids on mechanical resistance was not statistically significant. These results make sense insofar as the gloves initially used by the partner companies were made primarily of nitrile or polyurethane polymers, which showed better resistance to cutting fluids in the laboratory inflation tests. The results of the glove-cleaning treatments highlighted changes in morphology and mechanical properties, especially discoloration and a slight increase in puncture resistance.

The results of the workplace glove wear-and-tear program showed that the effect of normal use when contaminants are present is highly complex and not the same as with laboratory contamination. In the workplaces, the gloves were exposed not only to the effects of cutting fluids, but also to mechanical wear and tear associated with the specific characteristics of workplace operations (which sometimes differed from one worker to another). The puncture resistance tests showed that used gloves provided less protection than new ones. Changes in glove material morphology were also noted, including holes, traces of erosion and tears of varying depth. These signs of wear and tear may be due to chemical deterioration of the material and/or to mechanical wear and tear that occurs during work activities. The results of the user satisfaction survey and worker acceptance of the tested gloves show that there are no universal models valid for all professional tasks and appropriate for all types of work environments. A large proportion of workers will agree to wear some models, while refusing to wear others, and workers’ opinions about some gloves are extremely divided.

Generally speaking, the data from the cutting tests revealed wide variability, making it difficult to detect specific effects, whether for the gloves contaminated in the lab, cleaned or subjected to wear and tear in the workplace. To use this property in future studies, the specific cutting method needs to be clarified and better control over the different sources of variability should be considered.

This study enabled us to make recommendations regarding the best coating polymers for gloves used in metal machining and to determine which gloves could potentially replace those currently being used in the partner companies involved in the study. The research results also led to a better understanding of the effects of cutting fluids on the behaviour of the gloves under different conditions of use.

ISBN

9782896319640

Mots-clés

Gant de protection, Protective glove, Résistance des matériaux, Strength of materials, Risque mécanique, Mechanical hazard, Fluide de coupe, Cutting fluid, Essai d'usure, Wear testing, Travaux de laboratoire, Laboratory work, Résistance à la perforation, Penetration resistance, Application d'enduits anticorrosion, Anticorrosion coating, Polymères organiques, Organic polymers, Méthodologie, Methodology, Évaluation des résultats, Evaluation of results, Usure, Wear, Analyse par comparaison, Comparative analysis, Recommandation, Directive, Entretien de l'équipement, Equipment maintenance, Transformation des métaux, Metalworking industry, Suggestion de prévention, Safety suggestion, Québec

Numéro de projet IRSST

0099-9110

Numéro de publication IRSST

R-987

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