Type de document

Rapports de recherche scientifique

Année de publication

2015

Langue

Français

Résumé

Plusieurs pays industrialisés, incluant le Canada, ont opté pour le développement des nanotechnologies étant donné le grand potentiel économique que cela représente. Au Québec, de nombreuses entreprises de production de nanoparticules (NP) sont déjà implantées et il y a fort à parier que d’autres suivront ce mouvement d’ici peu. Ce faisant, le nombre de travailleurs œuvrant dans les domaines des nanotechnologies en général ou dans la fabrication et synthèse des NP augmentera grandement dans les prochaines années. Il est donc capital de prévenir le développement de maladies et d'accidents du travail reliés aux NP dont la cause est souvent d'ordre inflammatoire. Des données scientifiques s’accumulent et démontrent des effets toxiques et indésirables de certaines NP dont nous ne connaissons ni la toxicité ni l’efficacité des moyens pour les contenir. L’inflammation est un des effets toxiques des NP les plus répertoriés dans la littérature scientifique. Des études in vivo au cours desquelles des NP sont administrées à des rongeurs par la voie pulmonaire, voie par laquelle les travailleurs seraient le plus susceptibles d’être exposés aux NP, rapportent un nombre élevé de cellules immunitaires de type neutrophile, chef d’orchestre de l’inflammation. En dépit de ce fait, il était curieux de constater que très peu de données étaient disponibles quant aux interactions directes entre les NP et les neutrophiles. Sachant qu’en plus de la voie d’inhalation, les NP peuvent atteindre la circulation sanguine à la suite d’une ingestion et d’un contact dermique, il devient donc plausible d’imaginer que les neutrophiles, les leucocytes les plus abondants dans le sang humain, puissent interagir avec des NP.

Le présent projet visait à combler cette lacune. Ainsi, le premier objectif issu de cette problématique était de démontrer l'influence des NP sur la physiologie et sur les fonctions du neutrophile humain (volet in vitro). Le second objectif (volet in vivo) consistait à évaluer les effets des NP sur la réponse inflammatoire chez la souris.

Pour le volet in vitro, des neutrophiles de donneurs sains consentants ont été fraîchement isolés puis traités avec une NP donnée afin d’évaluer les capacités modulatoires sur plusieurs fonctions, toutes reliées au processus inflammatoire. Pour le volet in vivo, le modèle de la formation d’une poche d’air chez la souris a été employé. Brièvement, de l’air stérile était administré de façon sous-cutanée afin de créer une poche dans laquelle une NP donnée a été administrée pour diverses périodes de temps et à diverses concentrations (paramètres choisis à partir des résultats in vitro). Les cellules colonisant la poche ont ensuite été dénombrées puis identifiées afin d’évaluer l’infiltration neutrophilique.

En utilisant une approche expérimentale alliant à la fois les aspects in vitro et in vivo, nous avons été en mesure de déterminer quelles sont les NP qui affectent le plus la physiologie des neutrophiles et lesquelles provoquent une infiltration neutrophilique in vivo. Citons par exemple que, in vitro, le CeO2, le TiO2 et le ZnO provoquent des effets différentiels sur la phagocytose et la dégranulation des neutrophiles et que les NP d'argent (Ag) (dépendamment du diamètre) induisent une mort atypique des neutrophiles. Le ZnO et le TiO2 activent les neutrophiles et retardent leur entrée en apoptose. In vivo, nous avons remarqué que le TiO2 et les dendrimères provoquent une infiltration neutrophilique tandis que d'autres pas, comme c'est le cas du fullerenol (C60(OH)n).

La somme des résultats nous démontrent qu’il est difficile de classifier les NP strictement selon leur potentiel pro-inflammatoire et qu’il est préférable de présenter un tableau plus nuancé dans lequel les effets provoqués par une NP donnée sur la physiologie des neutrophiles humains in vitro et sur la capacité d’induire une infiltration neutrophilique in vivo doivent être pris en considération. Incidemment, les effets des NP sont extrêmement variés. Il est démontré que les NP n’agissent pas toutes de la même façon in vitro et in vivo et qu’elles peuvent avoir des effets complètement opposés selon leur diamètre initial.

Les retombées de ce projet effectué avec des cellules isolées d’individus sains permettront, par la suite, d’utiliser les cellules de certains travailleurs potentiellement exposés aux NP, afin d’étudier les fonctions des neutrophiles qui pourraient avoir des réponses fonctionnelles exagérées puisque déjà préactivées, un concept bien connu en matière d’inflammation. À l’inverse, si par exemple la fonction de phagocytose exercée par les neutrophiles de ces travailleurs s’avérait être diminuée, ces derniers pourraient être plus susceptibles aux infections, car cette fonction des neutrophiles a pour but d’ingérer les pathogènes et de les détruire. Ces observations, combinées à celles décrites par d’autres équipes étudiant d’autres facettes de la toxicité des NP, permettront d’aider les préventeurs lors de la prise de certaines décisions quant à la gestion des risques reliés à une exposition aux NP chez les travailleurs.

Abstract

A number of industrialized countries, including Canada, have opted for the development of nanotechnologies given their immense economic potential. Québec is already home to many companies that produce nanoparticles (NP), and the establishment of others can be expected in the near future. This means that the number of workers employed in nanotechnology fields in general or NP manufacture and synthesis will increase significantly in the coming years. Preventing the development of NP-related occupational diseases and work injuries, which are often of inflammatory in origin, is thus crucial. A growing body of scientific data demonstrates the toxic, adverse effects of some NPs, but we do not know either their toxicity or the effectiveness of measures to contain them. Inflammation is among the toxic effects of NPs most commonly reported in the scientific literature. In vivo studies in which NPs are administered to rodents by inhalation (the most likely NP exposure route for workers) report elevated counts of neutrophil immune cells, the key orchestrators of inflammation. Curiously, despite this, there is very little data on direct interactions between NPs and neutrophils. As NPs can reach the bloodstream not only through inhalation but also through ingestion or skin absorption, the idea that neutrophils, the most abundant type of white blood cell in human blood, would interact with NPs is plausible.

This project was meant to fill this gap. The first objective was thus to demonstrate the effect of NPs on the physiology and functions of the human neutrophil (in vitro study). The second objective (in vivo study) was to assess the effect of NPs on the inflammatory response in mice.

For the in vitro study, freshly isolated neutrophils from consenting healthy donors were treated with a specific NP to assess modulatory capacities on several functions related to the inflammatory process. For the in vivo study, the murine air-pouch model was used. Briefly, an air pouch was produced by subcutaneous injection of sterile air and an NP in a variety of concentrations was administered for diverse periods of time (parameters selected based on the in vitro results). The cells colonizing the pouch were then counted and identified to assess neutrophil infiltration.

By using an experimental approach that included in vitro as well as in vivo investigation, we were able to determine which NPs affect neutrophil physiology the most and which provoke neutrophil infiltration in vivo. For example, in vitro, CeO2, TiO2 and ZnO trigger differential effects on neutrophil phagocytosis and degranulation, and silver (Ag) NPs, depending on their diameter, cause atypical neutrophil death. ZnO and TiO2 activate neutrophils and delay their apoptosis. In vivo, we noted that TiO2 and dendrimers trigger neutrophil infiltration, whereas other NPs, such as fullerenol (C60(OH)n), do not.

In sum, our results demonstrate that strict classification of NPs according to their proinflammatory potential is difficult and that a better approach is to give a more nuanced picture in which the effects of a particular NP on the physiology of human neutrophils in vitro and on the capacity to induce neutrophil infiltration in vivo are taken into consideration. Incidentally, the impacts of NPs are extremely varied. It has been demonstrated that NPs do not all act in the same way in vitro and in vivo and that they can have the completely opposite effects depending on their initial diameter.

The results of this project carried out with isolated cells from healthy individuals will make it possible to use cells from workers who may have been exposed to NPs to study functions of neutrophils that might have exaggerated functional responses because they were already preactivated, a well-known concept in inflammation. Contrariwise, if, for example, the phagocytosis function of the neutrophils of these workers turns out to be diminished, then the workers may be more susceptible to infection, as the purpose of this neutrophil function is to ingest and destroy pathogens. These observations, together with those described by other teams studying other facets of NP toxicity, will help preventionists in making risk management decisions regarding occupational exposure to NPs.

ISBN

9782896318216

Mots-clés

Nanoparticule, Nanoparticle, Effet biologique, Biological effect, Détermination expérimentale, Experimental determination

Numéro de projet IRSST

2010-0021

Numéro de publication IRSST

R-886

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