Type de document

Rapports de recherche scientifique

Année de publication

2013

Langue

Anglais

Résumé

L’exposition prolongée par inhalation à des poussières de taille respirable contenant de la silice cristalline est reconnue pour causer des maladies respiratoires, dont le cancer du poumon et la silicose. De nombreuses études ont relevé la surexposition des travailleurs de la construction à la silice cristalline, puisque ce composé est présent dans de nombreux matériaux utilisés sur les chantiers. L’évaluation de l’exposition à la silice cristalline dans cette industrie constitue un défi en raison de la multitude de conditions de travail et de la nature temporaire des chantiers.

Dans le but d’améliorer les connaissances sur les conditions de travail pouvant exposer les travailleurs de la construction à la silice et de répondre à une demande initiale de la CSST, une équipe conjointe de l’Université de Montréal et de l’IRSST a monté une banque de données d’exposition professionnelle à ce contaminant à partir de la littérature. Ce premier projet a été financé par l’IRSST et a fait l’objet d’un rapport publié en 2011 par cet organisme. La banque de données contient plus de 10 000 mesures d’exposition provenant de périodiques scientifiques, de banques de données externes et de rapports d’organismes de recherche collectés à la suite d’une revue exhaustive de la littérature portant sur les 25 dernières années. Des analyses descriptives réalisées à partir des mesures quantitatives de la banque ont permis d’identifier les métiers et les tâches associées aux plus fortes expositions. Les chercheurs ont néanmoins souligné le potentiel important d’information additionnelle associé à l’emploi de techniques d’analyse multivariée, permettant d’évaluer l’influence simultanée de plusieurs variables sur les niveaux d’exposition. Le présent projet avait pour objectif principal d’approfondir l’exploitation de la banque de données afin de raffiner le portrait des expositions à la silice cristalline et d’estimer la contribution des différents déterminants de l’exposition.

Les données d’exposition à la silice cristalline ont d’abord été sélectionnées en fonction de la stratégie d’échantillonnage, résultant en deux analyses complémentaires ayant pour objectif d’estimer les niveaux d’exposition relativement aux valeurs limites d’exposition (VLE) sur huit heures en fonction du titre d’emploi, et de la tâche selon leur durée d’exécution. La méthode de Monte Carlo a été utilisée pour recréer les échantillons provenant de données rapportées sous forme de paramètres de synthèse (p. ex. moyenne et écart-type géométriques, moyenne arithmétique, fourchette), permettant leur analyse combinée avec les résultats rapportés sous forme de mesures uniques. Des modèles statistiques comprenant les variables tels le titre d’emploi, la tâche exécutée, la durée de mesure, l’année et la stratégie d’échantillonnage, le type de projet (démolition, nouvelle construction et rénovation), le secteur d’activité (p. ex. génie civil, résidentiel), l’environnement (extérieur, intérieur) et les moyens de maîtrise ont été développés et interprétés par inférence multimodèle. Ces analyses ont également été effectuées pour les échantillons en poussières respirables afin d’évaluer la présence d’effets potentiellement différents des déterminants de l’exposition. Par ailleurs, le croisement des données en silice cristalline et en poussières respirables a permis d’évaluer les différences entre les pourcentages en silice cristalline dans les échantillons aériens par titre d’emploi, tâche, outil, matériau et moyen de maîtrise à la source.

L’analyse des données en silice cristalline visant la comparaison à une VLE a été réalisée à partir de 1346 mesures couvrant 11 catégories de titre d’emploi. Le modèle contenant toutes les variables a expliqué 22 % de la variabilité des mesures tandis que l’année et la stratégie d’échantillonnage (conformité réglementaire vs surveillance) étaient les variables ayant le plus d’influence sur l’exposition. L’augmentation de la durée d’échantillonnage était associée à des niveaux plus faibles, tandis que les tendances temporelles par stratégie allaient dans des directions contraires avec une diminution de 17 % par an (conformité réglementaire) comparativement à une augmentation de 9 % par an (surveillance). L’utilisation de moyens de maîtrise (sans égard au type spécifique) diminuait les concentrations de 18 % à l’extérieur et de 24 % à l’intérieur. Les moyennes géométriques les plus élevées prédites pour l’année 1999 sur huit heures étaient retrouvées chez les foreurs (0,24 mg/m3), les travailleurs souterrains (0,22 mg/m3), les couvreurs œuvrant sur des toitures en plaques de béton (0,15 mg/m3) et les cimentiers-applicateurs (0,13 mg/m3). Les effets des déterminants pour les poussières respirables, estimés à partir de 1137 mesures, étaient comparables à ceux pour la silice cristalline; l’accord entre les moyennes géométriques prédites pour les deux types de contaminant était toutefois modéré (coefficient de corrélation de Spearman de 0,45).

Pour l’analyse des niveaux associés aux tâches, 1466 mesures de silice cristalline réparties en 27 catégories de tâches ont été sélectionnées. Le modèle contenant toutes les variables a expliqué 60 % des variations des niveaux d’exposition, et l’ensemble des variables contextuelles étaient fortement prédictives. Les moyennes géométriques prédites pour l’année 1998, selon la durée médiane par tâche, étaient plus élevées lors du bouchardage du béton (0,73 mg/m3), du cassage de pièces de maçonnerie avec outils multiples (incluant marteaux perforateurs/piqueurs) (0,59 mg/m3), du forage de tunnels (0,27 mg/m3), du décapage par projection d’abrasif (0,19 mg/m3) et du meulage de joints de brique (0,19 mg/m3). Une diminution importante des concentrations a été observée avec les systèmes d’arrosage (71 %) et d’aspiration des poussières (69 %) intégrés aux outils. Pour les poussières respirables (1566 mesures), les taux d’efficacité des moyens de maîtrise étaient généralement plus élevés avec des réductions de 88 % et 81 % de l’exposition pour ces mêmes catégories. L’accord entre les prédictions pour les deux contaminants était également plus élevé avec un coefficient de corrélation de Spearman de 0,70.

Le pourcentage médian en silice cristalline respirable, calculé à partir de 924 échantillons, était de 11 %. La majorité des pourcentages par catégorie de titre d’emploi, tâche, outil, matériau et moyen de maîtrise à la source étaient entre 6 % et 16 %, la valeur la plus élevée (19 %) étant retrouvée pour la catégorie de matériau « sable ».

L’analyse des données a montré une surexposition généralisée par rapport à la VLE de l’American Conference of Governmental Industrial Hygienists (ACGIH) et à la norme québécoise, indiquant un risque à long terme de maladies professionnelles pour tous les titres d’emploi à l’étude. Les résultats obtenus pour l’évaluation en fonction de la tâche exécutée montrent que cette stratégie permet une meilleure caractérisation des facteurs associés à l’exposition et un meilleur ciblage des priorités d’intervention pour contrôler les niveaux d’exposition à la silice cristalline sur les chantiers de construction durant un quart de travail.

Abstract

Prolonged exposure by inhalation to respirable sized dusts containing crystalline silica is known to cause respiratory diseases, including lung cancer and silicosis. Many studies have identified the overexposure of construction workers to crystalline silica since this compound is present in many materials used on construction sites. Evaluation of crystalline silica exposure in this industry is a challenge due to the many working conditions and the temporary nature of the sites.

In order to improve knowledge about working conditions that can expose construction workers to silica and to respond to an initial request from the CSST, a joint team from the Université de Montréal and the IRSST developed an occupational exposure database for this contaminant based on the literature. This initial project was funded by the IRSST and was the subject of a report published in 2011 by this organization. The database contains more than 10,000 exposure measurements, originating from scientific periodicals, external databases and reports from research organizations, collected following an exhaustive literature review covering the last 25 years. Descriptive analyses produced from quantitative measurements from the database identified the professions and tasks associated with the highest exposures. The researchers nevertheless emphasized the important potential for additional information. This potential is associated with the use of multivariate analytical techniques, allowing the evaluation of the simultaneous influence of several variables on the exposure levels. The present project had the primary objective of furthering the use of the database in order to refine the portrait of crystalline silica exposures and to evaluate the contribution of the different exposure determinants.

The crystalline silica exposure data were first selected on the basis of the sampling strategy, resulting in two complementary analyses whose objective was to estimate the exposure levels in relation to the threshold limit values (TLVs) over eight hours according to the occupation title, and the task in relation to its performance duration. The Monte Carlo method was used to recreate the samples originating from data reported in the form of synthesis parameters (e.g., geometric mean and geometric standard deviation, arithmetic mean, range), allowing their combined analysis with the results reported in the form of single measurements. Statistical models including variables such as occupation title, the task performed, the measurement duration, the year and the sampling strategy, the type of project (demolition, new construction and renovation), the activity sector (e.g., civil engineering, residential), the environment (outdoor, indoor) and the control methods were developed and interpreted using multi-model inference. These analyses were also performed for the respirable dust samples in order to evaluate the presence of effects potentially different from the exposure determinants. Furthermore, cross-tabulation of data on crystalline silica and respirable dusts made it possible to evaluate the differences between the percentages of crystalline silica in the air samples by occupation title, task, tool, material and source control method.

The analysis of crystalline silica data for comparison with a TLV was based on 1346 measurements covering 11 categories of occupation titles. The model containing all the variables explained 22% of the variability in the measurements, whereas the year and sampling strategy (regulatory compliance vs. surveillance) were the variables with the most impact on the exposure. The increase in the sampling duration was associated with lower levels, whereas the time trends by strategy went in opposite directions with a reduction of 17% per year (regulatory compliance) compared to an increase of 9% per year (surveillance). The use of means of control (without considering the specific type) reduced the concentrations by 18% outdoors and 24% indoors. The highest predicted geometric means for the year 1999 over eight hours were found in drillers (0.24 mg/m3), underground workers (0.22 mg/m3), roofers working on concrete slab roofing (0.15 mg/m3) and cement finishers (0.13 mg/m3). The effects of the determinants for respirable dusts, estimated from 1137 measurements, were comparable to those for crystalline silica; however, the agreement between the predicted geometric means for the two types of contaminants was moderate (Spearman correlation coefficient of 0.45).

For the analysis of the task-related levels, 1466 crystalline silica measurements in 27 task categories were selected. The model containing all the variables explained 60% of the variations in exposure levels, and all of the contextual variables were highly predictive. The predicted geometric means for the year 1998, based on the median duration by task, were higher during concrete bush hammering (0,73 mg/m3), breaking masonry with multiple tools (including jackhammers/percussion drills) (0.59 mg/m3), tunnel boring (0.27 mg/m3), abrasive blasting (0.19 mg/m3) and brick joint grinding (0.19 mg/m3). A major reduction in concentrations was observed with the spraying systems (71%) and dust vacuum systems (69%) integrated into the tools. For respirable dusts (1566 measurements), the efficiencies of the means of control were generally higher, with exposure reductions of 88% and 81% for these same categories. The agreement between the predictions for the two contaminants was also higher, with a Spearman correlation coefficient of 0.70.

The median percentage of respirable crystalline silica, calculated from 924 samples, was 11%. The majority of the percentages by category of occupation title, task, tool, material and source control method were between 6% and 16%, with the highest value (19%) being found for the "sand" material category. The data analysis showed a generalized overexposure in relation to the TLV of the American Conference of Governmental Industrial Hygienists (ACGIH) and to the Québec standard, indicating a long-term risk of occupational diseases for all the occupation titles studied. The results obtained for the task-related evaluation show that this strategy provides a better characterization of the exposure-related factors and a better identification of the intervention priorities for controlling the crystalline silica exposure levels on construction sites during a work shift.

ISBN

9782896317004

Mots-clés

Silice cristalline, Crystalline silica, Conditions d'exposition, Conditions of exposure, Base de données, Data base, Bâtiment et travaux publics, Construction industry, Poussière respirable, Respirable dust, Critère de risque, Hazard criteria, Matériau de construction, Building material, Machine-outil, Machine tool, Technique de prévention, Safety and health engineering, Québec

Numéro de projet IRSST

2010-0044

Numéro de publication IRSST

R-801

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