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Rapports de recherche scientifique

Année de publication

2021

Langue

Français

Résumé

L’épicondylose latérale du coude, communément appelée « épicondylite » ou tennis elbow, est un syndrome douloureux et incapacitant. L’épicondylose est particulièrement fréquente dans la population en âge de travailler et touche autant les hommes que les femmes. Dans certains secteurs d’emploi, l’épicondylose peut affecter un travailleur sur cinq.

Cette pathologie est favorisée par une surutilisation du poignet et de l’avant-bras. Malgré les avancées de la médecine moderne, le traitement de l’épicondylose du coude demeure bien souvent un défi thérapeutique. Plusieurs types de traitement sont proposés. Aucun consensus ni modèle de prise en charge standardisé n’existe. Les coûts directs de santé et surtout les coûts indirects découlant de l’invalidité au travail et des indemnités de revenu reliées à l’épicondylose demeurent très élevés.

Le traitement de première intention de l’épicondylose est le repos du coude par la mise en application d’une ergonomie visant à éviter la sollicitation des tendons épicondyliens. La physiothérapie et/ou une rééducation par un programme d’exercices faits à la maison sont également recommandées. Cette approche favorise la guérison chez plus de 80 % des patients à 12 mois. Toutefois, un certain nombre de patients sont réfractaires au traitement médical pouvant comprendre en plus du repos et de la rééducation, le port d’une orthèse, des traitements par ondes de choc extracorporelles et les injections de cortisone, de plasma riche en plaquettes et autres substances. Ces patients peuvent demeurer symptomatiques et présenter une incapacité fonctionnelle au travail pendant plusieurs mois voire des années.

Devant l’échec du traitement médical, une intervention chirurgicale visant à débrider et à réparer le tendon pathologique peut être proposée. Il existe différentes approches chirurgicales, mais la plus fréquemment utilisée consiste à réaliser une courte incision à la peau pour accéder au tendon, et à réséquer quelques millimètres du tendon correspondant au tissu pathologique. La peau est par la suite refermée et la cicatrisation des tissus s’ensuit. Les études rapportent une efficacité thérapeutique de l’ordre de 70 % à 80 % et, encore aujourd’hui, la chirurgie est considérée comme étant le traitement ultime de l’épicondylose.

La fenestration échoguidée est une procédure minimalement invasive relativement nouvelle. Sous anesthésie locale et guidage échographique, à l’aide d’une fine aiguille, plusieurs perforations contrôlées sont réalisées dans la partie lésée du tendon et la surface osseuse sous-jacente est avivée. L’objectif de cette technique est de débrider le tissu pathologique et de déclencher une réaction inflammatoire afin de stimuler les mécanismes physiologiques de prolifération cellulaire et de réparation tendineuse. Quelques études évaluant l’efficacité thérapeutique de cette technique ont rapporté des résultats encourageants. Aucune étude n’avait jusqu’ici comparé l’efficacité de la fenestration échoguidée à celle de la chirurgie.

Ainsi, l’objectif principal de notre étude était d’évaluer l’efficacité thérapeutique de la fenestration échoguidée et celle de la chirurgie par approche ouverte chez des travailleurs souffrants d’épicondylose chronique, réfractaire à au moins 6 mois de traitement médical.

Cette étude visait également à examiner l’impact de ces deux traitements sur différents aspects de l’activité professionnelle, la force de préhension et sur des caractéristiques morphologiques et les propriétés mécaniques du tendon évaluées par échographie.

L’hypothèse qui soutenait cette étude était que la fenestration échoguidée est une technique minimalement invasive efficace pour le traitement de l’épicondylose chronique et constitue une alternative thérapeutique valable à la chirurgie par approche ouverte.

Cette étude a été réalisée au Centre hospitalier de l’Université de Montréal de 2016 à 2020. Soixante-quatre travailleurs souffrant d’une épicondylose chronique ont été répartis en nombre égal dans chacun des groupes d’intervention et ont été suivis pendant 12 mois. Périodiquement, les patients devaient répondre à des questionnaires, leur force de préhension était mesurée à l’aide d’un dynamomètre et leur coude était examiné par échographie.

Aucun effet indésirable associé aux interventions n’est survenu au cours de cette étude.

L’âge moyen des travailleurs qui ont participé à cette étude était de 48 ans avec une distribution homme - femme équivalente. Les patients souffraient d’une épicondylose depuis 23 mois en moyenne et tous avaient suivi un traitement médical pendant au moins 6 mois précédant leur entrée dans l’étude. La majorité des patients avaient eu recours à plusieurs traitements différents. Parmi les plus fréquents, on retrouvait : le port d’une orthèse; la physiothérapie; les injections de cortisone et un programme d’exercices faits à la maison.

Au moment d’entrer dans l’étude, 20 % des patients étaient en arrêt de travail et 5 % étaient affectés à des tâches allégées. Dans le contexte de leur travail, la majorité des patients rapportaient devoir effectuer une ou plusieurs des activités suivantes : mouvements répétitifs avec l’avant-bras; mouvements de flexion du poignet; mouvements de flexion et d’extension du coude; travaux physiques légers ou lourds; utilisation d’un clavier ou d’une souris d’ordinateur.

Sur la base de différents indicateurs cliniques, le taux de succès thérapeutique parmi les patients traités par fenestration échoguidée a été comparable à celui des patients traités chirurgicalement. Dans chacun des groupes d’intervention, 80 % des patients ont dit être « nettement ou complètement améliorés » à 6 mois après l’intervention. De plus, l’amélioration clinique des patients dans le temps a été comparable.

Les résultats de l’étude démontrent que le retour au travail s’effectue plus rapidement après la fenestration comparativement à la chirurgie. La chirurgie par approche ouverte nécessite un certain temps de convalescence pour permettre la guérison de la plaie cutanée et la cicatrisation du tendon qui est en partie réséqué. La fenestration favorise la guérison du tendon via des mécanismes d’inflammation. Il n’y a pas d’incision cutanée. Il n’y pas de résection de tissu. Pour ces raisons, la réparation et le remodelage du tendon semblent s’effectuer plus rapidement. D’ailleurs l’analyse des paramètres d’imagerie suggère que la fenestration altère moins la structure du tendon et qu’elle favorise une amélioration plus rapide des propriétés mécaniques du tendon, que la chirurgie.

En conclusion, la fenestration échoguidée est une intervention thérapeutique minimalement invasive efficace pour traiter l’épicondylose chronique du coude. Dans les cas d’épicondylose réfractaire à 6 mois de traitement médical, cette intervention peut être proposée. Cet algorithme thérapeutique pourrait favoriser une réduction des coûts directs et indirects reliés à l’épicondylose. Cette étude a jeté les bases pour réaliser des essais cliniques futurs de plus forte puissance statistique et selon une approche pragmatique pour confirmer les résultats et définir la place de la fenestration échoguidée dans l’algorithme de prise en charge de l’épicondylose du coude.

Abstract

Lateral epicondylitis of the elbow, commonly known as “tennis elbow,” is a painful, debilitating condition. It strikes the working-age population in particular and affects both men and women. In some job sectors, one in every five workers suffers from tennis elbow.

The condition is associated with overuse of the wrist and forearm. Despite the advances of modern medicine, treatment of epicondylitis still often presents a considerable therapeutic challenge. A number of different treatment options are available. No treatment consensus or standard treatment protocol exists. The direct health care costs of tennis elbow and especially the indirect costs related to disability and workers’ compensation are still very high.

The first line of treatment is to rest the elbow in accordance with ergonomic guidelines aimed at avoiding any demand on the epicondyle tendons. Physiotherapy and/or rehabilitation through a program of exercises to be done at home are also recommended. This approach leads to healing in over 80% of patients at 12 months. Nevertheless, some patients do not respond to medical treatment ranging from rest and rehabilitation to wearing a brace, extracorporeal shock wave treatment and injections of cortisone, platelet-rich plasma or other substances. These patients may remain symptomatic and continue to suffer from functional disability at work for many months, if not years.

When other medical treatment options fail, surgery involving debridement and repair of the unhealthy tendon can be offered. There are a number of different surgical techniques, but the one most often used is to make a short incision in the skin to give access to the tendon and to resect a few millimetres of it to remove the pathological tissue. The skin is then sewn up and the tissue allowed to heal. With studies reporting therapeutic efficacy in the order of 70% to 80%, surgery is still regarded as the ultimate treatment option for epicondylitis.

Ultrasound-guided tendon fenestration is a relatively new, minimally invasive procedure. After local anaesthesia of the skin, and with ultrasound guidance, a fine needle is used to make a number of controlled perforations in the damaged region of the tendon and to abrade the underlying surface of the bone. The purpose of this technique is to debride the unhealthy tissue and trigger an inflammatory reaction that will stimulate the physiological mechanisms of cell proliferation and tendon healing. A few studies assessing the technique’s therapeutic efficacy have reported encouraging results. No study has yet compared the efficacy of ultrasound-guided fenestration with that of surgery.

The main goal of our study was to assess the therapeutic efficacy of ultrasound-guided fenestration and that of open-release surgery on workers suffering from chronic epicondylitis who had not responded to at least six months of medical treatment.

A further goal was to examine the impact of these two treatment options on various aspects of occupational activity, including grip strength, and on the morphological characteristics and mechanical properties of the tendon assessed by ultrasound.

The hypothesis underlying the study was that ultrasound-guided fenestration is an effective, minimally invasive technique for the treatment of chronic epicondylitis and constitutes a viable therapeutic alternative to open-release surgery.

The study was conducted at the Centre hospitalier de l’Université de Montréal from 2016 to 2020. Sixty-four workers suffering from chronic epicondylitis were divided into two equal treatment groups and were followed for 12 months. Periodically, the patients responded to questionnaires, their grip strength was measured using a dynamometer and their elbow was examined by ultrasound.

No undesirable effects associated with the procedures occurred during the study.

The mean age of the workers who took part was 48, with an equal number of men and women. The patients had been suffering from epicondylitis for 23 months, on average, and all of them had received medical treatment for at least six months before they joined the study. Most of the patients had tried several different types of treatment. Some of the most common treatment options were wearing a brace, physiotherapy, cortisone injections, and a program of exercises to be done at home.

At the time of joining the study, 20% of the patients were off work, and 5% were assigned to light duties. With regard to their work, most of the patients reported having to perform one or more of the following activities: repetitive movements with the forearm; bending movements of the wrist; bending and extending of the elbow; light or heavy physical work; use of a computer keyboard or mouse.

On the basis of various clinical indicators, the rate of therapeutic success among the patients treated by ultrasound-guided fenestration was comparable to that of patients treated surgically. In each treatment group, 80% of the patients said they were “much improved or completely recovered” six months after the procedure. In addition, the clinical improvement of the patients over time was comparable.

The study results showed that patients treated by fenestration were able to return to work sooner than those treated by surgery. Open-release surgery requires a certain convalescence period to allow the incision and the tendon, which has been partially resected, to heal. Fenestration promotes healing of the tendon through inflammatory mechanisms. There is no incision in the skin. There is no resection of tissue. As a result, the tendon repair and remodelling seem to take place faster. Moreover, analysis of the imaging parameters suggests that fenestration impairs the structure of the tendon less and promotes faster improvement in the tendon’s mechanical properties than surgery does.

In conclusion, ultrasound-guided fenestration is an effective, minimally invasive therapeutic technique for treating chronic epicondylitis of the elbow. In cases of epicondylitis that do not respond to treatment after six months, this option can be proposed. This therapeutic algorithm could lead to a reduction in direct and indirect costs related to tennis elbow. Our study has laid the foundations for future clinical trials that have greater statistical power and take a pragmatic approach to confirm the results and define the place of ultrasound-guided fenestration in the algorithm for treating epicondylitis of the elbow.

ISBN

9782897971489

Mots-clés

Épicondylite, Epicondylitis, Traitement médical, Medical treatment, Affection des membres supérieurs, Upper extremity disorder, Traitement chirurgical, Surgical treatment, Troubles musculosquelettiques, Musculoskeletal disease, Réadaptation, Rehabilitation, Force de préhension, Grip strength, Fenestration échoguidée

Numéro de projet IRSST

2015-0034

Numéro de publication IRSST

R-1128-fr

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