Type de document
Rapports de recherche scientifique
Année de publication
1997
Langue
Français
Résumé
Ce document est l’annexe du rapport R-157
Problème: Une intervention majeure en ergonomie participative a eu lieu en 1989-1990. Elle concernait la problématique des maux de dos affectant les manutentionnaires de la SAQ. La présente recherche visait à vérifier dans quelle mesure cette intervention avait permis de rendre les travailleurs et les gestionnaires plus aptes à poursuivre leur travail de prévention dans la période post-intervention; à connaître les facteurs organisationnels et psycho-sociaux qui ont favorisé (ou limité) la dynamique de prévention post-intervention; et à évaluer l'efficacité et l'impact économique de la dynamique de prévention déclenchée par l'intervention ergonomique.
Méthode: La recherche est une étude de cas divisée en trois volets complémentaires. Le volet ergonomique a permis de recueillir des données auprès des groupes de travail formés lors de l'intervention pour connaître, notamment, leur composition, leur degré d'activités ergonomiques et leur fonctionnement participatif. Le volet organisationnel et psycho-social s'est intéressé aux données portant sur l'évolution de l'organisation de l'entreprise et de son mode de gestion, l'évolution des risques du travail et de la prévention des accidents suite à l'intervention. Quant au volet économique, il a consisté à développer une méthodologie d'analyse «coûts-bénéfices» afin d'estimer l'impact économique de l'intervention ergonomique et de la dynamique de prévention qui a suivi.
Résultats obtenus: Cette étude fournit des connaissances inédites sur les effets d'une intervention ergonomique de type participatif, sur les facteurs organisationnels et psychosociaux qui favorisent ou freinent la dynamique de prévention, et sur les avantages économiques qui peuvent résulter d'une telle intervention et de ses suites. L'intervention ergonomique que nous avions à évaluer avait deux volets, l'un réalisé à Québec, l'autre à Montréal. Si cette double intervention avait officiellement la même philosophie, dans les faits, il ressort clairement que nous avons eu affaire à deux types d'interventions distincts. Alors qu'à Québec, nous sommes en présence d'une intervention de type participatif qui s'attache à résoudre les problèmes d'une organisation du travail très largement manuelle et stable, à Montréal, nous nous retrouvons avec une intervention tout autre. Inspirée très largement par la biomécanique et voulant intervenir sur une organisation du travail très mécanisée, le caractère participatif y a été moins prononcé pour ne pas dire absent. La singularité de chaque intervention a par ailleurs marqué différemment la suite des événements. Tandis qu'à Québec, nous avons observé une reprise des activités de prévention inspirées par les idées de l'ergonomie participative, à Montréal, nous avons surtout assisté à une lutte entre la direction de la distribution et le syndicat autour de la norme journalière de manutention. L'expérience faite à Québec servant alors de référence à ceux et celles qui désiraient améliorer les conditions de travail du C. D. M..
En dépit de la nature différente des interventions menées dans les deux entrepôts étudiés, les résultats ergonomiques sont dans les deux cas non négligeables. En effet, à Québec comme à Montréal, nous avons observé que de nombreux dossiers avaient été traités et qu'il en avait résulté une amélioration sensible du dossier des lésions professionnelles, notamment des maux de dos. Les données ergonomiques dont nous disposons, sont toutefois plus parlantes à Québec qu'à Montréal, en particulier dans le département de la préparation des commandes qui a été l'objet de l'intervention d'ergonomie participative. À Montréal, l'abolition du système automatisé de préparation des commandes, sans être attribuable directement à l'intervention ergonomique, a eu également des retombées positives. Après avoir connu une hausse consécutive au conflit et à l'implantation du nouveau système, les lésions professionnelles ont diminué de façon significative.
Au niveau économique, les données que nous avons recueillies sont également intéressantes. L'intervention menée à Québec semble avoir été bénéfique pour l'entreprise. Au C. D. Q., on peut même dire que l'ergonomie participative a été, dans ce cas-ci, profitable sur le plan financier. Dans le cadre du C. D. M., nous n'avons pas pu évaluer l'intervention de la même manière. Nous avons donc dû faire une analyse coût-bénéfice de l'abolition du système automatisé de préparation des commandes. Les résultats que nous avons prouvent sans aucun doute que cette décision, là aussi, a été très bénéfique pour les travailleurs, l'entreprise et la société en général.
Malgré ces résultats tangibles, nous avons par ailleurs vu que la perception qu'en avaient les travailleurs et certains contremaîtres était critique, voire très négative, notamment au C. D. M.. Nous avons également pu constater que ces réactions n'étaient compréhensibles qu'en renvoyant à la dynamique psycho-sociale et organisationnelle de chaque entrepôt. Ce volet de notre enquête montre bien que toute intervention en matière de prévention des lésions professionnelles qui néglige ces derniers aspects risquent de rencontrer des obstacles qui nuiront au bon déroulement du processus. En d'autres termes, lorsqu'on cherche à développer des pratiques innovatrices en milieux de travail afin de réduire les accidents, il faut s'assurer que les pratiques de gestion, les discours et les comportements des cadres soient cohérents avec ce que l'on veut mettre en place. Il faut aussi que la culture de métier des travailleurs soit reconnue, entendue et retenue. Nous avons vu que lorsque c'était le cas, les résultats pouvaient être intéressants.
En faisant appel à l'expérience professionnelle des travailleurs et, en leur permettant de s'exprimer, en revalorisant le rôle et les qualités des contremaîtres, en sensibilisant davantage les niveaux d'encadrement supérieur à la nécessaire reconnaissance de ce que le personnel fait et représente, les interventions de nature préventive risquent d'avoir des effets bénéfiques. L'enquête que nous avons menée à la SAQ, si elle a relevé des lacunes en ces domaines, notamment au C. D. M., nous montre aussi que des pratiques innovatrices en matière de SST, comme peut l'être l'ergonomie participative, ou encore des décisions radicales comme celle d'abolir un système de préparation des commandes problématique, constituent des actions bénéfiques. Les bénéfices touchent non seulement le dossier des lésions professionnelles mais aussi plus généralement l'amélioration de la gestion de la SST dans son ensemble.
Retombées prévisibles: Ces résultats sont utiles à tous les intervenants en santé et sécurité au travail pour spécifier dans quelles conditions l'intervention en ergonomie participative peut être la plus efficace.
Mots-clés
Ergonomie, Ergonomics, Participation des travailleurs, Worker participation, Responsabilité des employeurs, Responsibility of employers, Manutention et stockage, Handling and storage, Maux de dos, Backache, Évaluation ergonomique, Ergonomic evaluation, Étude de cas, Case study, Aspect économique, Economic aspect, Aspect social, Social aspect, Québec, Montréal-région, Montreal-region
Numéro de projet IRSST
0092-1160
Numéro de publication IRSST
RA-157
Citation recommandée
Carpentier-Roy, M.-C., Chanlat, J.-F., Lanoie, P. et Patry, L. (1997). Ergonomie participative, mode de gestion et performance en prévention des accidents du travail : le cas de la Société des alcools du Québec : annexe (Annexe de rapport n° RA-157). IRSST. https://pharesst.irsst.qc.ca/rapports-scientifique/798
