Type de document

Expertisesrevues

Année de publication

2014

Langue

Anglais

Résumé

L’exposition au froid ou à la chaleur déclenche une série de réponses physiologiques compensatrices qui permettent à l’organisme humain de maintenir sa température interne malgré un stress thermique. Ces mécanismes de thermorégulation sont bien documentés et les changements physiologiques qu’ils impliquent peuvent modifier les fonctions de plusieurs organes liées à l’absorption et au métabolisme des substances chimiques. Des études dans le domaine de la pharmacologie et de l’épidémiologie rapportent une augmentation de l’absorption et des effets de certains médicaments de même qu’une augmentation du taux de mortalité humaine associée à la pollution de l’air, lors d’une exposition simultanée à la chaleur et à des xénobiotiques. En extrapolant ces données à la santé au travail, il est permis de croire qu’une exposition concomitante aux contraintes thermiques et aux substances chimiques est susceptible d’accroître l’absorption de certains xénobiotiques de même que leurs effets.

Le premier objectif de cette recherche visait à recenser l’ensemble des données publiées dans la littérature scientifique récente. Le deuxième objectif consistait à identifier les travailleurs québécois exposés aux substances chimiques et qui pourraient être les plus touchés par les contraintes thermiques. Une attention particulière a été accordée à la présence de substances chimiques susceptibles d’affecter les mécanismes de thermorégulation.

La revue de la littérature a été effectuée en interrogeant les bases de données bibliographiques Medline, Toxline et Chemical Abstract pour la période allant de janvier 1990 à juin 2012 afin de documenter les changements physiologiques associés aux contraintes thermiques, les expositions concomitantes aux contraintes thermiques et aux substances chimiques ainsi que leurs effets, les travailleurs exposés aux substances chimiques les plus susceptibles d’être affectés par les contraintes thermiques et les substances chimiques pouvant affecter les mécanismes de thermorégulation. Une démarche faisant appel au jugement professionnel a été subséquemment utilisée afin d’identifier les milieux de travail québécois où l’exposition aux contraintes thermiques était susceptible d’entraîner une modification de la toxicocinétique des substances chimiques. Ainsi, 13 experts dans le domaine des contraintes thermiques ou de l’hygiène industrielle ont été individuellement consultés afin qu’ils hiérarchisent les 136 emplois retenus à l’égard de l’importance de la problématique étudiée.

Les données recueillies montrent que l’impact de l’exposition au froid sur la toxicocinétique et les effets des substances chimiques a été peu étudié. Dans les quelques études recensées, on y rapporte qu’une exposition à un stress thermique froid entraîne habituellement une diminution de la toxicité des substances chimiques. L’exposition à la chaleur est, quant à elle, associée à une augmentation de l’absorption pulmonaire et cutanée des xénobiotiques, ceci étant souvent associé à une augmentation de leur toxicité et de leur concentration dans les fluides biologiques. La surveillance biologique de l’exposition peut être utilisée afin de mettre en évidence l’augmentation de l’absorption pulmonaire ou cutanée des contaminants lors d’une exposition à la chaleur. L’importance de l’augmentation dépend de l’intensité du stress thermique, des niveaux d’exposition et des caractéristiques physico-chimiques des substances chimiques.

Parmi les emplois les plus concernés au Québec par cette problématique, on en retrouve 20 appartenant au secteur de la fabrication des produits minéraux non métalliques / première transformation des métaux / fabrication de produits métalliques ainsi que les couvreurs de toiture et les pompiers. Ces milieux de travail devraient être priorisés dans le cadre de recherches ultérieures visant à mieux caractériser le risque associé à l’exposition simultanée aux contraintes thermiques et aux substances chimiques. De façon plus spécifique, l’exposition à certains contaminants peut affecter les mécanismes de thermorégulation et ainsi diminuer la capacité des travailleurs à s’adapter à la chaleur. Les travailleurs principalement visés par cette problématique sont ceux exposés au plomb et à ses composés inorganiques (poussières et fumées), à certains pesticides (organophosphorés et carbamates) et aux fumées d’oxydes métalliques (zinc, aluminium, antimoine, cadmium, cuivre, magnésium, manganèse, étain).

Ce bilan permettra de guider les intervenants en santé au travail dans leurs démarches d’évaluation du risque lors de situations d’exposition simultanée aux contraintes thermiques et aux substances chimiques, notamment en ayant permis de cibler certains emplois plus à risque. Les données compilées dans le présent rapport pourront également être utilisées pour le développement de modèles toxicocinétiques afin de permettre une meilleure évaluation du risque. Des études en milieu de travail pourraient être également menées afin de documenter, en situation réelle, l’influence d’une exposition à la chaleur sur l’absorption et la toxicocinétique des substances chimiques; la surveillance biologique constituant un outil de choix dans l’étude de cette problématique.

Abstract

Exposure to cold or heat triggers a series of compensatory physiological responses enabling the human body to maintain its internal temperature despite thermal stress. These thermoregulation mechanisms are well documented and the resulting physiological changes can modify organ functions related to the absorption and metabolism of chemical substances. Pharmacological and epidemiological studies report an increase in the absorption and effects of certain drugs, and higher human mortality associated with air pollution, on simultaneous exposure to heat and xenobiotics. Extrapolation of these data to occupational health suggests that concurrent exposure to thermal stress and chemical substances is likely to increase the absorption and effects of some xenobiotics.

The primary objective of this research was to survey all data published in recent scientific literature. The second objective was to identify Quebec workers exposed to chemical substances who might be the most affected by thermal stress. Careful attention was given to the presence of chemical substances likely to affect thermoregulation mechanisms.

The literature review was based on a search of Medline, Toxline and Chemical Abstract bibliographic data from January 1990 to June 2012, the purpose being to document physiological changes associated with thermal stress, concurrent exposures to thermal stress and chemical substances and their effects, workers exposed to chemical substances who are mostly likely to be affected by thermal stress, and chemical substances that can affect thermoregulation mechanisms. An approach relying on professional judgment was then used to identify Quebec workplaces where exposure to thermal stress was likely to modify the toxicokinetics of chemical substances. Thirteen experts in thermal stress or industrial hygiene were consulted individually for purposes of classifying the 136 identified jobs in relation to the significance of the issue under study.

The collected data show that there have been few studies on the impact of exposure to cold on the toxicokinetics and effects of chemical substances. The few studies that were surveyed report that exposure to cold thermal stress usually decreases the toxicity of chemical substances. Exposure to heat, on the other hand, is associated with increased pulmonary and cutaneous absorption of xenobiotics, which in turn is often associated with increased toxicity and concentration in body fluids. Biological monitoring of exposure can be used to demonstrate increased pulmonary or cutaneous absorption of contaminants on exposure to heat. The magnitude of the increase depends on the intensity of the thermal stress, exposure levels and the physico-chemical characteristics of the chemical substances.

Of the occupations most affected by this issue in Quebec, 20 are in the non-metallic mineral manufacturing/primary metal processing/metal product manufacturing industry, as well as roofers and firefighters. These work environments should be prioritized in future research intended to further characterize the risk associated with simultaneous exposure to thermal stress and chemical substances. More specifically, exposure to certain contaminants can affect thermoregulation mechanisms and decrease the ability of workers to adapt to heat. This issue primarily affects workers exposed to lead and its inorganic compounds (dust and fumes), certain pesticides (organophosphates and carbamates) and metal oxide fumes (zinc, aluminum, antimony, cadmium, copper, magnesium, manganese, tin).

This survey, by identifying higher-risk occupations, will help guide occupational health professionals in assessing risk in cases of simultaneous exposure to thermal stress and chemical substances. The data compiled in this report may also be used to develop toxicokinetic models for improved risk assessment. Workplace studies could also be done in order to document, in actual conditions, the effect of heat exposure on the absorption and toxicokinetics of chemical substances. Biological monitoring would be a tool of choice in studying this issue.

ISBN

9782896317462

Mots-clés

Charge thermique, Heat load, Thermorégulation, Regulation of body temperature, Produit chimique, Chemical product, Synergie température-toxicité, Temperature-toxicity synergism, Effet biologique, Biological effect, Substance toxique, Toxic substance, Exposition, Exposure, Lieu de travail chaud, Hot workplace, Lieu de travail froid, Cold workplace, Profession, Occupation, Évaluation du risque, Hazard evaluation, Québec, Xénobiotique, Xenobiotic

Numéro de projet IRSST

2010-0008

Numéro de publication IRSST

R-834

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