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Rapports de recherche scientifique

Année de publication

2019

Langue

Français

Résumé

Produit de distillation du pétrole, le bitume est chauffé puis mélangé à de la matière minérale broyée (le granulat) pour former l’enrobé bitumineux qui est utilisé pour le pavage de la grande majorité des routes. Les gaz, vapeurs et particules émis lorsque le bitume ou l’enrobé est chauffé sont constitués d’un groupe complexe de composés chimiques réglementés sous le nom de fumées d’asphalte (ou de bitume), notamment dans le Règlement sur la santé et la sécurité du travail du Québec. Si le bitume démontre un manque d’adhésivité au granulat selon la norme prescrite, une dope d’adhésivité (additif chimique) y est ajoutée. Ce type de bitume, que l’on nommera bitume haute résistance au désenrobage (HRD), est utilisé au Québec depuis environ 15 ans.

Depuis quelques années, des travailleurs du pavage se plaignent de problèmes d’irritation des yeux et du système respiratoire à la suite de l’utilisation de bitume HRD avec ce type d’additif. Cependant, les substances émises lors de la mise en œuvre d’un enrobé avec bitume HRD avec dope d’adhésivité ont fait l’objet de peu d’études. Les deux premiers objectifs de la présente étude étaient de caractériser en laboratoire les fumées émises par un bitume HRD avec additif pour ensuite identifier les composés chimiques spécifiques à ce type de bitume et qui sont soupçonnés irritants ou sensibilisants. Le troisième objectif était de développer une méthode de prélèvement et d’analyse des composés mis en évidence par cette recherche pour évaluation ultérieure en milieu de travail.

Deux approches complémentaires ont été utilisées en laboratoire : un système de génération par espace de tête (headspace, HS) couplé à la chromatographie phase gazeuse et spectrométrie de masse (CPG-SM) et un système de génération par réacteur. Trois ensembles bitumes et additifs (dope d’adhésivité), nommés ici S, V et W, ont été retenus pour cette étude sur la base de leur fréquence d’utilisation par le ministère des Transports, de la Mobilité durable et de l’Électrification des transports du Québec.

Les deux approches ont permis d’identifier plusieurs composés contenus dans les émissions produites lors des générations avec additifs seuls, notamment des amines, amides, aminoalcool, glycols et éthers de glycol. Lors des générations de fumées avec bitume, l’approche HS-CPG-SM n’a permis de mettre en lumière qu’un nombre restreint de composés spécifiquement attribuables à la présence de l’additif, soit la pyrazine (S, V et W), l’éthylène glycol (W), le diéthylène glycol (W) et le triéthylène glycol (W).

En se basant sur leur caractère irritant et leur représentativité de l’ensemble des composés identifiés, dix composés ont été évalués systématiquement lors de 74 essais de génération par réacteur, grâce notamment à l’optimisation de la méthode IRSST 363 (Amines dans l’air). Les résultats obtenus ont démontré que la majorité des composés évalués étaient attribuables à la présence d’additif dans les trois bitumes étudiés. Les composés présentant les concentrations les plus élevées lors des générations étaient les suivants : pipérazine (S, V et W), éthylène diamine (S, V et W), éthanolamine (W), diéthanolamine (W) et diéthylène glycol (W). La température de chauffage du bitume dans le réacteur s’est avérée être le principal déterminant des concentrations mesurées. Des échantillons d’air prélevés en centrale d’enrobage, directement au-dessus du réservoir de bitume avec additif (S) à 160-165 °C, ont révélé des résultats du même ordre de grandeur que ceux obtenus au laboratoire pour le même bitume, venant ainsi confirmer la validité des résultats obtenus par l’approche réacteur et ainsi l’atteinte de l’ensemble des objectifs de l’étude.

Cette recherche permet de conclure que la présence des additifs dans le bitume pourrait augmenter le potentiel irritant des fumées d’asphalte. Des évaluations plus poussées en milieu de travail sont cependant requises pour confirmer le niveau d’exposition des travailleurs à ces composés irritants.

Abstract

Bitumen, a product of petroleum distillation, is heated and then mixed with crushed mineral materials (aggregate) to form the hot mix asphalt that is used for paving most roads. The gases, vapours and particles emitted when the bitumen or asphalt is heated are composed of a complex group of chemical compounds that are regulated under the name of asphalt fumes, in particular in Quebec’s Regulation respecting occupational health and safety. If bitumen does not adhere to the aggregate according to the prescribed standard, an anti-stripping agent (chemical additive) is added to it. This type of bitumen, which we will call high stripping resistance (HSR) bitumen, has been used in Quebec for approximately 15 years.

For several years, paving workers have been complaining about irritation of the eyes and respiratory system following the use of HSR bitumen with this type of additive. However, the substances emitted during paving with HSR bitumen with an anti-stripping agent have been studied very little. The first two objectives of this study were to characterize in the laboratory the fumes emitted by HSR bitumen with an additive and then identify the specific chemical compounds in this type of bitumen that are suspected to be irritants or sensitizers. The third objective was to develop a sampling and analysis method for the compounds identified in this study so they can later be assessed in the workplace.

Two complementary approaches were used in the lab: a headspace (HS) generating system coupled with gas chromatography–mass spectrometry (GC-MS) and a reactor generating system. Three mixtures of bitumen and additives (anti-stripping agent), called S, V and W here, were selected for this study, based on the frequency of their use by Quebec’s Ministère des Transports, de la Mobilité durable et de l’Électrification des transports.

The two approaches enabled the identification of several compounds contained in the emissions produced during generation with single additives, including amines, amides, amino alcohol, glycols and glycol ethers. During generation of fumes with bitumen, the HS-GC-MS approach revealed only a limited number of compounds that were specifically attributable to the presence of the additive, namely pyrazine (S, V and W), ethylene glycol (W), diethylene glycol (W) and triethylene glycol (W).

Based on their irritant nature and their representativeness among all the compounds identified, 10 compounds were systematically assessed in 74 reactor generation tests, using an optimized version of IRSST method 363 (Amines in the air). The results showed that most of the compounds evaluated were attributable to the presence of the additive in the three types of bitumen studied. The compounds with the highest concentrations during the generation tests were the following: piperazine (S, V and W), ethylenediamine (S, V and W), ethanolamine (W), diethanolamine (W) and diethylene glycol (W). The temperature at which the bitumen was heated in the reactor proved to be the main determinant of the concentrations measured. Air samples taken in an asphalt mixing plant directly above the tank of bitumen with an additive (S) at 160–165 °C revealed results on the same order of magnitude as those obtained in the laboratory for the same bitumen, confirming that the results obtained with the reactor approach were valid and thus that all of the study’s objectives were achieved.

This research allows one to conclude that the presence of additives in bitumen may increase the irritant potential of asphalt fumes. Nevertheless, more detailed assessments in the workplace are required to confirm workers’ exposure level to these irritants.

ISBN

9782897970697

Mots-clés

Fumées d'asphalte, Asphalt fumes, Additif, Additive, Évaluation du risque, Hazard evaluation, Substance irritante, Irritant, Bitume, Bitumen, Irritation, Affection respiratoire, Respiratory disease, Affection des yeux et annexes, Disease of eyes and related structures, Risque chimique, Chemical hazard, Échantillonnage dans l'air, Air sampling, Détermination expérimentale, Experimental determination, Méthodologie, Methodology, Québec

Numéro de projet IRSST

2014-0040

Numéro de publication IRSST

R-1063

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