Type de document

Rapports de recherche scientifique

Année de publication

2016

Langue

Français

Résumé

Les absences prolongées du travail, et particulièrement celles liées aux troubles mentaux courants (TMC) et aux troubles musculosquelettiques (TMS), engendrent des coûts économiques et humains considérables. Devant cet enjeu, il apparaît nécessaire de mieux comprendre les facteurs qui nuisent au retour au travail (RAT) de ces deux populations. Selon la littérature, il est bien établi que le RAT est le résultat d’une interaction complexe entre l’individu et les acteurs provenant de divers systèmes tels que le milieu de travail, le système de santé et celui de l’indemnisation. Mis à part quelques particularités ou caractéristiques individuelles telles que les symptômes inhérents à un trouble particulier, ou encore la variation des délais de rétablissement, les obstacles perçus par les personnes souffrant d’un TMC ou d’un TMS lors de leur processus de RAT se recoupent en général, à tel point que de récents travaux commencent à étudier les travailleurs en incapacité comme une seule et même population, sans égard à la nature de la maladie ou de la lésion. La littérature met en exergue le besoin non seulement d’évaluer les obstacles perçus lors du RAT, mais aussi de prendre en compte le sentiment d’efficacité pour les surmonter, deux notions essentielles et complémentaires à l’évaluation des facteurs du RAT. Or, dans la littérature, il n’existe à notre connaissance aucun outil adapté aux populations aux prises avec un TMC ou un TMS qui mesure à la fois les obstacles liés au RAT et le sentiment d’efficacité pour les surmonter.

L’objectif de cette étude prospective visait la validation de l’outil intitulé « Obstacles au Retour au Travail Et Sentiment d’Efficacité pour les Surmonter » (ORTESES) auprès d’employés en processus de RAT suite à un TMC ou un TMS. Plus précisément, il s’agissait de valider les propriétés psychométriques relatives à l’ORTESES : (1) validité de contenu, (2) validité apparente, (3) validité de construit, (4) stabilité temporelle (fidélité) et (5) validité prédictive.

Cette étude comportait trois phases. D’abord, dans la phase 1, les participants qui répondaient aux critères d’inclusion et qui ont consenti à participer à l’étude ont rempli le questionnaire ORTESES (TMC (n=157) ou TMS (n=206)) et un questionnaire sociodémographique. Ensuite, la phase 2 a eu lieu une à deux semaines plus tard, pour répondre aux exigences de l’évaluation de la fidélité test-retest. Enfin, la phase 3, qui se déroulait six mois après la phase 1, a permis d’évaluer la validité prédictive de l’ORTESES grâce à l’utilisation d’analyses de régression. Tous les participants de la phase 1 étaient alors recontactés par téléphone pour prendre connaissance de la reprise ou non de leur activité professionnelle.

Validités de contenu et apparente. La version initiale de l’ORTESES comptait 97 énoncés répartis entre six grandes catégories conceptuelles. Validité de construit. Au terme des analyses factorielles (exploratoires et confirmatoires) et des analyses de cohérence interne effectuées sur les catégories conceptuelles construites a priori, un total de 46 énoncés répartis sur dix dimensions sont ressorties: (1) appréhension d'une rechute, (2) difficultés cognitives, (3) difficultés liées aux médicaments, (4) exigences du poste de travail, (5) sentiment d'injustice organisationnelle, (6) relation difficile avec le supérieur immédiat, (7) relations difficiles avec les collègues, (8) relations difficiles avec la compagnie d’assurance, (9) conciliation famille-travail difficile, (10) perte de motivation à retourner au travail. Fidélité. Les résultats des analyses de corrélation ont montré que les dix dimensions demeurent stables dans le temps (2 semaines) chez les deux populations (TMC et TMS). Validité prédictive. En plus du nombre de semaines d’absence du travail et de la douleur perçue, quatre dimensions (obstacles perçus et sentiment d’efficacité) prédisent le RAT des personnes ayant un TMS : l’appréhension d’une rechute, les exigences du poste de travail, le sentiment d'injustice organisationnelle, la relation difficile avec le supérieur immédiat. Chez les personnes ayant un TMC, ce sont seulement les exigences du poste de travail et les difficultés cognitives qui ressortent comme significatives.

En conclusion, cette étude a permis de valider l’outil intitulé ORTESES. Elle comble un vide théorique dans la littérature en montrant que les obstacles biopsychosociaux ainsi que le sentiment d’efficacité pour les surmonter doivent être pris en compte dans la prédiction du RAT de personnes aux prises avec un TMC ou un TMS. Sur le plan clinique, l’étude offre aux intervenants la possibilité de travailler avec un outil valide et d’administration brève – 46 énoncés couvrant dix dimensions – qui leur permettra d’évaluer systématiquement ces deux notions chez leurs clients. Ainsi, ils pourront optimiser leurs interventions en vue de faciliter le RAT de leurs clients. L’ORTESES est donc un outil de travail et de dialogue pour les deux interlocuteurs. Une fois effectuée l’identification des dimensions ou couples d’énoncés « problématiques », l’intervenant peut entamer une discussion avec son client et mettre en place l’intervention et les stratégies pertinentes. Enfin, l’intervenant pourra décider d’utiliser l’ORTESES comme outil de suivi dans le but d’évaluer si certains obstacles disparaissent ou persistent dans l’environnement de travail ou dans la vie personnelle de son client.

Note

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Abstract

Prolonged sick leaves, particularly those related to common mental disorders (CMDs) and musculoskeletal disorders (MSDs), generate considerable economic and human costs. This issue compels us to improve our understanding of the factors hindering a return to work (RTW) among these two populations. It is well established in the literature that the RTW is the result of a complex interaction between the worker and stakeholders in the various systems, such as the workplace, healthcare and compensation systems. Apart from a few particularities or distinct characteristics, such as the symptoms inherent to a specific disorder or variations in recovery time, the obstacles perceived by individuals suffering from a CMD or an MSD during their RTW process generally overlap, to such a degree that recent research has begun looking at workers on sick leave for either reason as one and the same population, regardless of the nature of their illness or injury. The literature highlights the need to not only evaluate the obstacles perceived during the RTW, but also take into account the worker’s self-efficacy beliefs about overcoming them, two essential notions that complement the evaluation of RTW factors. However, to our knowledge, no tools exist in the literature that are adapted to populations with a CMD or an MSD and that measure both RTW-related obstacles and self-efficacy beliefs about overcoming them.

The aim of this prospective study was to validate the tool entitled the Return-to-Work Obstacles and Self-Efficacy Scale (ROSES) with employees involved in the RTW process following a CMD- or MSD-related sick leave. More specifically, it sought to validate the psychometric properties of ROSES: (1) content validity, (2) face validity, (3) construct validity, (4) temporal stability (test-retest reliability) and (5) predictive validity.

The study had three phases. First, in Phase 1, the participants who met the inclusion criteria and consented to participate in the study completed the ROSES questionnaire (CMD (n=157) or MSD (n=206)) and a sociodemographic questionnaire. Phase 2 took place one to two weeks later in order to meet the evaluation requirements for test-retest reliability. Lastly, Phase 3, which took place six months after Phase 1, involved evaluating ROSES’ predictive validity by means of regression analyses. All Phase 1 participants were contacted again by telephone to find out whether or not they had returned to their job.

Content and face validities. The initial version of ROSES included 97 items divided into six main conceptual categories. Construct validity. Based on the factor analyses (exploratory and confirmatory) and internal consistency analyses performed on the previously constructed conceptual categories, a total of 46 items divided among ten dimensions emerged: (1) fears of a relapse, (2) cognitive difficulties, (3) medication-related difficulties, (4) job demands, (5) feeling of organizational injustice, (6) difficult relations with the immediate supervisor, (7) difficult relations with co-workers, (8) difficult relations with the insurance company, (9) difficult work/life balance and (10) loss of motivation to return to work. Reliability. The results of the correlation analyses showed that the ten dimensions remained stable over time (two weeks) in both populations (CMD and MSD). Predictive validity. In addition to the number of weeks of sick leave and perceived level of pain, four dimensions (perceived obstacles and self-efficacy beliefs) predicted the RTW of the individuals with an MSD: fears of a relapse, job demands, feeling of organizational injustice and difficult relations with the immediate supervisor. For the individuals with a CMD, only job demands and cognitive difficulties emerged as significant.

In conclusion, this study validated the ROSES tool. It also filled a theoretical gap in the literature by showing that both biopsychosocial obstacles and self-efficacy beliefs about overcoming them should be taken into account in predicting the RTW of individuals with a CMD or an MSD. On the clinical level, the study offers health professionals the opportunity to work with a valid, quickly administered tool – 46 items covering ten dimensions – that will enable them to systematically assess these two notions in their clients. They will then be able to optimize their interventions to facilitate their clients’ RTW. ROSES thus constitutes a working tool that facilitates dialogue for both parties. Once the dimensions of the paired “problematic” items (obstacles and self-efficacy beliefs) have been identified, health professionals can initiate a discussion with their clients and adopt pertinent interventions and strategies. Lastly, they will be able to use ROSES as a follow-up tool if certain obstacles disappear or persist in the client’s work environment or personal life.

Nota

To obtain tools validated by the Center for Study and Research in Mental Health and Work, including ORTESES, visit http://www.mentalhealthwork.ca/, go to YOUR WEB SPACE > STAKEHOLDERS and log in. You do not have an account? Register.

ISBN

9782896318988

Mots-clés

Maintien en emploi, Job maintenance, Absentéisme maladie, Sickness absenteeism, Conciliation travail-vie personnelle, Work-family balance, Aggravation, Trouble psychique, Mental disorder, Troubles musculosquelettiques, Musculoskeletal disease, Performance cognitive, Cognitive performance, Motivation, Relations intergroupes, Intergroups relations, Insatisfaction au travail, Job dissatisfaction, Aménagement des postes, Workplace design, Traitement médical, Medical treatment, Rôle des assureurs, Role of insurance institutions, Enquête par questionnaire, Questionnaire survey

Numéro de projet IRSST

2010-0069

Numéro de publication IRSST

R-938

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