Type de document

Rapports de recherche scientifique

Année de publication

2022

Langue

Français

Résumé

Les espaces clos parmi les plus courants dans les milieux de travail au Québec sont les réservoirs, les cuves, les puits d’accès, les égouts, les tuyaux et les citernes. Les entrées en espace clos sont effectuées, entre autres, pour des raisons de maintenance (p. ex. : réparation, inspection, nettoyage, déblocage). Les risques pour la santé et la sécurité des travailleurs impliqués sont variés : atmosphérique, chimique, biologique, mécanique, physique ou liés à une chute ou au non-respect des principes ergonomiques. Dans le cadre de ce projet, une moyenne de 2,6 décès par an en espace clos au Québec sur la période 1998-2017 a été recensée (53 décès) en consultant les rapports d’enquête d’accidents graves et mortels de la Commission des normes, de l’équité, de la santé et de la sécurité du travail (CNESST). Cela représente environ 4 % de l’ensemble des décès causés par un accident du travail sur cette période.

Le travail en espace clos au Québec est réglementé par le Règlement en santé et en sécurité du travail (RSST) et le Code de sécurité pour les travaux de construction (CSTC). La réduction des risques lors des interventions en espace clos s’effectue traditionnellement par l’émission de permis d’entrée, une ventilation naturelle et mécanique, la mesure des gaz et l’utilisation d’équipement de protection individuelle (EPI). Bien que privilégiée dans les normes et potentiellement plus efficace, la mise en place de mesures à la conception des espaces clos et l’utilisation de la protection collective semblait encore marginale dans les organisations, selon une précédente étude de l’IRSST (Chinniah et al., 2016).

La présente étude s’intéresse donc aux moyens placés le plus haut dans la hiérarchie de réduction du risque pour les interventions en espace clos, c’est-à-dire les moyens pour éliminer ou réduire les risques à la source ainsi que les mesures de protection collective. Dans ce projet, à des fins de simplification, ces notions ont été regroupées sous le terme « prévention intrinsèque et protection collective » (PIPC) pour les espaces clos. Cela inclut toutes les mesures mises en place lors de la conception de l’espace clos ou lors de sa modification (c.-à-d. réingénierie, rétrofit) et qui permettent de réduire les risques pour l’ensemble des personnes qui interviennent (p. ex. point d’intervention déplacé à l’extérieur de l’espace clos pour éviter l’entrée).

Considérant que les connaissances existantes dans la littérature et dans la pratique sur le terrain ne sont pas structurées, l’objectif de cette étude consistait à bâtir une base de connaissances sur les mesures de PIPC pour réduire les risques lors des interventions en espace clos. Cette base de connaissances inclut un agencement des différents principes de réduction du risque mis en oeuvre ainsi que des informations sur l’environnement, le contexte d’opérations, les effets envisagés sur la réduction du risque et les contraintes techniques et organisationnelles à prendre en compte. Afin de bâtir cette base de connaissances, une méthodologie en trois phases a été utilisée.

Lors de la phase 1 du projet, dix accidents mortels en espace clos ont été analysés avec la technique de l’arbre des causes (AdC). Cette analyse a permis d’identifier les causes primaires des accidents en lien avec des lacunes de conception et de démontrer le potentiel des mesures de PIPC dans ce contexte.

Lors de la phase 2, quinze experts en gestion des risques pour les espaces clos (p. ex. : formateur, consultant, préventeur en industrie, concepteur côté client) ont été consultés sur l’implantation et sur l’utilisation des mesures de PIPC. Les facteurs favorisants et les contraintes exprimés par les experts quant à l’adoption des mesures de PIPC sur le terrain ont ainsi été recensés. À ce sujet, une prise en compte de l’ensemble du cycle de vie de l’espace clos par le concepteur, une planification à long terme des investissements par l’utilisateur et un engagement dans la relation concepteur-utilisateur concernant la SST sont ressortis comme étant des leviers importants. Cette phase de l’étude a également permis de proposer un modèle à l’intention des concepteurs et des utilisateurs qui structure les mesures de PIPC pour les espaces clos selon les principes suivants : P1) éliminer complètement l’espace ; P2) déclasser l’espace clos en travaillant sur les risques ; P3) supprimer la nécessité d’entrer pour effectuer une tâche spécifique ; P4) réduire le besoin d’entrer de manière générale ; P5) améliorer l’accès, l’intervention et l’évacuation. À noter qu’une démarche de réduction du risque devrait toujours s’appuyer sur une démarche complète d’évaluation du risque et non seulement sur une approche de conformité réglementaire (p. ex. définition d’un espace clos).

Finalement, lors de la phase 3 du projet, 19 études de cas en entreprise ont été effectuées afin de recenser les mesures de PIPC utilisées ou qui pourraient l’être pour des interventions réelles ciblées. Les secteurs d’activités inclus dans l’échantillon ont été ceux du traitement des eaux, de la distribution électrique/télécommunication, des pâtes et papiers, de la fabrication de pièces, du traitement chimique, du transport et de la maintenance industrielle/génie civil. Afin d’exploiter les 112 solutions recensées en lien avec 30 espaces clos, une base de données relationnelle interrogeable a été développée. Chaque solution a été associée dans la base de connaissances à un contexte (c.-à-d. espace clos, intervention), à une problématique (c.-à-d. risques, caractéristiques de conception problématiques), à un mécanisme de réduction du risque (c.-à-d. principes P1 à P5, types de mesures) et à des contraintes d’implantation (c.-à-d. techniques, organisationnelles). Les solutions sont présentées dans ce rapport en premier lieu par type d’espace clos (c.-à-d. réservoir, bassin, puits d’accès/chambre, cheminée, intérieur d’un équipement industriel) et elles sont regroupées comme suit : 6 % des solutions portent sur les principes P1 et P2, 54 % sur les principes P3 et P4 et 40 % sur le principe P5. Les options concernant P1 et P2 sont limitées, notamment à cause du fait que les participants se sont d’abord placés dans un contexte de modification de l’existant (P3 à P5). Des travaux de recherche spécifiquement avec des fabricants d’espaces clos pourraient permettre de combler cette limite.

Finalement, cette base de connaissances et les AdC développés devront faire l’objet d’une activité de valorisation afin de fournir aux utilisateurs un accès interactif à l’ensemble des données. La diffusion de la base de connaissances contribuera à sensibiliser les concepteurs, les intégrateurs et les préventeurs à l’importance et aux opportunités de réduire les risques en espace clos en se basant sur la PIPC.

Abstract

The most common confined spaces in Québec workplaces are tanks, bins, manholes, sewers, pipes and vats. Workers enter these confined spaces for a variety of reasons, including to perform maintenance (e.g., repairs, inspection, cleaning and unclogging). However, confined spaces pose health and safety risks, for workers concerned. These risks may be atmospheric, chemical, biological, mechanical, physical (trips and falls, for example) or ergonomic. Our review of the serious/fatal accident investigation reports issued by the Commission des normes, de l’équité, de la santé et de la sécurité du travail (CNESST) for 1998 to 2017 showed an average 2.6 deaths per year (53 deaths) in confined spaces in Québec, accounting for about 4% of all fatal work accidents in the province during the period.

Work in confined spaces is regulated in Québec by the Regulation respecting occupational health and safety and the Safety Code for the construction industry. Confined space risk reduction measures have traditionally taken the form of work permits, natural or mechanical ventilation, gas measurements and use of personal protective equipment (PPE). Although inherently safer design and collective protection measures are recommended in standards and may be more effective approaches, they are still marginal in the Québec workplace according to an earlier IRSST study (Chinniah et al., 2016).

This study looks at measures at the top of the hierarchy of risk control for confined spaces, that is, measures to eliminate or reduce risks at the source and collective protection measures. In the interests of simplicity, the term “inherently safer design and collective protection” or “ISD-CP” is used in this project to refer to such measures. ISD-CP includes all measures introduced when designing or modifying (i.e., re-engineering or retrofitting) a confined space to reduce risks for all stakeholders (e.g., relocating a rescue/intervention site outside the confined space to eliminate the need for entry).

As existing knowledge in the literature and in practice in the field is not structured, the goal of this study was to build a knowledge base on ISD-CP measures for confined space risk management. This knowledge base includes a breakdown of applicable risk reduction principles; information on the environment, circumstances and anticipated impact of risk reduction; and technical and organizational barriers that must be considered. A three-phase methodology was used to build the knowledge base.

In Phase 1, fault tree analysis (FTA) was used to investigate ten fatal accidents in confined spaces. This made it possible to identify the primary design shortcomings responsible for the accidents and to demonstrate the potential for ISD-CP measures in these situations.

In Phase 2, fifteen experts in confined space risk management (e.g., trainers, consultants, practicing preventionists and client-side designers) were consulted about introducing and using ISD-CP measures. From these consultations, barriers as well as factors favorable to the adoption of ISD-CP in the eyes of these experts were identified. Key levers proved to be designer consideration of the entire life cycle of the confined space, long-term investment planning by the user and a commitment to OHS in the user-designer relationship. In this phase, we were also able to propose a model for designers and users that structures ISD-CP measures for confined spaces according to the following principles: P1) completely eliminate the confined space; P2) declassify the confined space by reducing risks; P3) eliminate the need for entry regarding a specific task; P4) reduce the need for entry in general ; P5) improve access, intervention and rescue. Note that a risk reduction approach must always be based on a complete risk assessment and not just on regulatory compliance (e.g., definition of a confined space).

During Phase 3 of the project, 19 case studies were conducted in industry to identify ISD-CP measures that are or could be used for real targeted interventions. The following sectors of activity are represented in the sample: water treatment, power distribution/telecommunication, pulp and paper, parts manufacturing, chemical treatment, transportation and industrial maintenance/civil engineering. To render usable the 112 solutions identified in connection with 30 confined spaces, a searchable relational database was developed. Each solution was associated in the knowledge base with a context (a confined space, a task), a problem (risks, problematic design features), a risk reduction mechanism (principles P1 to P5, a type of measure) and barriers to its implementation (technical, organizational). Presented in this report by type of confined space (tank, vat, access shaft/chamber, chimney, interior of industrial equipment), the solutions break down as follows: 6% are applications of principles P1 and P2; 54% are applications of principles P3 and P4; and 40% are applications of principle P5. Solutions applying principles P1 and P2 are limited, notably because modification of existing spaces (principles P3 to P5) is the primary approach in the situations faced by our research participants. Research targeting manufacturers of confined spaces might help grow the number of solutions applying principles P1 and P2.

Lastly, this knowledge base and the fault tree analyses developed should be the subject of a knowledge translation activity that will provide users interactive access to all the data. Dissemination of the knowledge base will help raise awareness among designers, integrators and preventionists of the importance of reducing confined space risks and the opportunities do so with the help of ISD-CP measures.

ISBN

9782897972363

Mots-clés

Travail en espace clos, Work in confined spaces, Gestion du risque, Risk management, Gestion du risque, Risk management, Aspect statistique des accidents du travail, Statistical aspect of occupational accidents, Cause d'accident, Cause of accident, Accident mortel, Fatality, Base de données, Data base, Méthodologie, Methodology

Numéro de projet IRSST

2016-0043

Numéro de publication IRSST

R-1167-fr

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