Type de document
Rapports de recherche scientifique
Année de publication
2005
Langue
Français
Résumé
Cette étude constitue la suite d’une première recherche visant à mieux comprendre le travail et les risques qui en découlent de même que les avenues de solutions possibles dans les magasins-entrepôts de grande surface.
Des questionnaires visant à décrire les symptômes de stress et de TMS ont d’abord été adressés aux travailleurs (n=116) et aux directeurs (n=28) de six succursales d’une importante chaîne de magasins-entrepôts d’articles de bureau. La population de travailleurs présente les caractéristiques suivantes : 88 % sont des hommes, 64 % ont moins de 25 ans, 65 % sont à temps partiel et 50 % ont moins d’un an d’ancienneté. Il ressort que les travailleurs ressentent des symptômes de TMS principalement au bas du dos (62,1 %) et aux jambes (45,7 %). Le questionnaire de Karasek fait ressortir que 74 % des travailleurs ont une faible autonomie décisionnelle (AD) et 42,2 % une demande psychologique élevée (DP). Quant à la combinaison de ces deux paramètres, près d’un travailleur sur trois présente un risque élevé (DP+AD-). Le questionnaire de Maslach a également été utilisé pour documenter les symptômes de stress. Il ressort que près d’un individu sur cinq présente un risque élevé quant à l’épuisement émotionnel et à la dépersonnalisation alors que près d’un individu sur trois est à risque élevé relativement au sentiment d’accomplissement personnel. Les résultats montrent que travailleurs et directeurs présentent des symptômes de stress différents. Les directeurs sont plus souvent exposés à une demande psychologique élevée et à un risque élevé d’épuisement émotionnel, mais moins souvent exposés à un risque élevé quant à la dépersonnalisation ou au sentiment de faible accomplissement personnel.
Suite au questionnaire, une analyse du travail ergonomique a été réalisée dans deux succursales, l’une à gros volume de ventes (magasin A) et l’autre à petit volume (magasin C). Les tâches de service à la clientèle et de manutention ont été analysées avec les méthodes classiques de l’ergonomie (observations et entretiens préliminaires, observations systématiques, entretiens en profondeur et journal de bord).
Ce sont surtout les caractéristiques du service à la clientèle qui génèrent du stress chez les travailleurs. Il faut servir plusieurs clients alors que la densité de personnel est faible. Les interventions sont brèves avec une durée moyenne de moins d’une minute (pour le service dans les allées). Plus du tiers des interventions se font en simultanée, ce qui signifie que le travailleur doit servir plus d’un client ou sentir la pression de clients en attente. Les données montrent que les travailleurs sont souvent interrompus (aux heures de pointe, les travailleurs ne peuvent passer, en moyenne, plus d’une demi-minute à faire une même tâche); ils ont donc souvent de la difficulté à compléter une tâche. Les travailleurs sont aussi stressés par les pressions qu’ils reçoivent pour la vente de garanties prolongées de même que par les clients désagréables ou agressifs.
Lors de l’analyse des activités de manutentions, les chercheurs ont surtout approfondi la gestion des stocks et des arrivages de même que le travail en hauteur. Des difficultés liées à la gestion des stocks et des arrivages entraînent plusieurs problèmes. Comme le rangement dans les espaces d’entreposage laisse à désirer, les travailleurs perdent du temps à chercher la marchandise. Dans le magasin à petit volume, sur une période de quatre heures d’observation de l’activité de remplissage, les travailleurs ont consacré 23 % de leur temps à la recherche de produits. Par ailleurs, un surplus de marchandise et une utilisation non optimale des espaces de rangement entraînent une surcharge des rayonnages supérieurs (over-stocks). Il en résulte des manutentions supplémentaires et du travail en hauteur plus difficile. Dans plus de la moitié des manutentions observées, celles-ci s’effectuaient avec les mains au-dessus des épaules. On a aussi observé des utilisations plus dangereuses de l’échelle comme le fait de déposer plusieurs boîtes sur la plate-forme ou de déposer des boîtes sur le rebord de la cage. On a vu aussi à plusieurs reprises que les travailleurs avaient les pieds à l’extérieur de la plate-forme ou prenaient les boîtes sur la pointe des pieds, augmentant les risques de chute et de perte d’équilibre. Il y a, de plus, des manutentions supplémentaires dans près de 30 % des manutentions observées. Comme les piles sont hautes et instables, le travailleur doit souvent déplacer des boîtes afin d’atteindre la boîte qu’il doit manutentionner et il en résulte bien sûr une augmentation de la charge totale déplacée.
Suite au travail des groupes de recherche de solutions, des propositions ont été soumises à un comité de suivi composé notamment de membres de la centrale située à Toronto. De plus, les difficultés rencontrées par les chercheurs ont été documentées tout au long de l’intervention à l’aide d’un journal de bord. Un roulement élevé du personnel et des contacts irréguliers avec la centrale de Toronto sont les deux grandes difficultés rencontrées par les chercheurs.
La discussion se veut d’abord une réflexion sur le stress et ses causes et sur les difficultés liées à la gestion des stocks et des arrivages de même qu’au travail en hauteur. Les auteurs, sur la base de leurs deux études dans le secteur, tentent de faire le bilan de la situation dans les magasins-entrepôts. Ils terminent en s’interrogeant sur les constats possibles quant aux interventions à faire dans ce type de commerce. Bien que les mêmes déterminants soient en cause, ils n’affectent pas de la même façon le travail et les risques qui en découlent; de plus, les solutions ne sont pas toujours identiques. Les auteurs affirment donc qu’il n’est pas possible de proposer des avenues de solutions clé en main pour les magasins-entrepôts. Toutefois, sur la base des connaissances acquises, il serait possible de guider les intervenants dans une démarche d’analyse du travail adaptée aux magasins-entrepôts. Des guides pour mener des entretiens et des aides à l’observation de même que des questionnements critiques pour les solutions pourraient être développés pour les praticiens ayant à intervenir dans le secteur.
Mots-clés
Entrepôt, Warehouse, Commerce de détail, Retail trade, Évaluation ergonomique, Ergonomic evaluation, Évaluation du risque, Hazard evaluation, Stress mental, Mental stress, Manutention et stockage, Handling and storage, Troubles musculosquelettiques, Musculoskeletal disease, Travail en hauteur, Work at height, Posture de travail, Work posture, Stockage sur rayonnages, Rack storage, Manutention manuelle, Manual handling, Escabeau, Step ladder, Plateforme élévatrice, Elevating platform, Questionnaire
Numéro de projet IRSST
0099-2100
Numéro de publication IRSST
R-441
Citation recommandée
St-Vincent, M., Denis, D., Trudeau, R. et Imbeau, D. (2005). Commerce de détail. Phase II : analyse ergonomique des activités de manutention et de service à la clientèle dans des magasins-entrepôts de grande surface (Rapport n° R-441). IRSST. https://pharesst.irsst.qc.ca/rapports-scientifique/441
