Type de document
Rapports de recherche scientifique
Année de publication
2008
Langue
Français
Résumé
C’est au début des années 90 que la CSST a fait une première demande à l’IRSST pour étudier l’efficacité du port des ceintures de sécurité pour la conduite de chariots élévateurs. En 1998, René Benoît et Josée Duquette (Duquette et Benoît, 1998) déposaient un bilan exhaustif sur l’ensemble des dispositifs de sécurité utilisés sur les chariots élévateurs. Dans ce bilan, on reprochait principalement la non-représentativité des résultats de certaines études. De plus, Duquette et Benoît (Duquette et Benoît, 1998) ont noté, à plusieurs reprises, le caractère contradictoire entre les études effectuées sur les mêmes dispositifs de sécurité. Ces conclusions ont mené l’École Polytechnique de Montréal à développer, en 1999, un modèle de renversement de chariot élévateur comprenant un humanoïde virtuel de type Hybrid III. Élaboré sous la plateforme de simulation numérique MADYMO, ce modèle a été créé avec l’objectif d’étudier, pour toute situation de renversement possible, l’efficacité des dispositifs de sécurité disponibles sur le marché. En 2003, l’École Polytechnique de Montréal, secondée par le groupe de recherche PERSEUS de l’Université de Sherbrooke, et conjointement avec l’INRS, en France, ont travaillé à la calibration et à la validation de ce modèle. À l’été 2006, des essais de renversement quasi-statiques ont été réalisés à l’INRS pour valider le modèle quasi-statique développé dans MADYMO. En plus des essais sur mannequin, l’INRS a procédé à des essais sur sujets humains auxquels nous avons participé. Dans un premier temps, ces essais avaient pour but de connaître l’apport en termes de sécurité de divers dispositifs de sécurité, tels des portillons, des accoudoirs, un siège à oreilles, combinés ou non à la ceinture de sécurité. Dans un deuxième temps, ces essais avaient pour but d’évaluer les recommandations des constructeurs quant au cramponnage ou au calage du cariste lors du renversement latéral.
Les essais ont démontré que le cariste est exposé à plusieurs situations où des lésions importantes peuvent survenir. Pour le cas d’un renversement latéral quasi-statique, c’est-à-dire sans vitesse d’avance ou de recul importante du chariot (< 5 km/h), trois types de lésions sont possibles :
- un choc de la tête avec le sol;
- un choc de la tête avec la structure de protection contre la chute d’objet (FOPS); et
- un écrasement sous le FOPS suite à une tentative de sortie du cariste hors de l’habitacle lors du renversement ou à une chute du cariste plus rapide que le renversement du chariot.
Lorsqu’on considère un renversement à grande vitesse (de l’ordre de 15-20 km/h), on s’expose en plus à une expulsion complète ou partielle du corps lors du renversement. Cette expulsion résulte, la plupart du temps, en un écrasement du cariste par le FOPS.
Les résultats obtenus des essais expérimentaux ont permis de déterminer que le port de la ceinture de sécurité ou l’installation d’une porte complète, combiné à un système de protection au niveau de la tête, seraient des moyens efficaces pour protéger le cariste contre la plupart des lésions qui surviennent lors du renversement latéral. Tout autre système d’appoint tel que des sièges enrobant ou à oreilles, des sièges avec accoudoirs, ou des portillons peuvent contribuer à limiter les dangers d’expulsion, mais nous apparaissent peu efficaces pour protéger le cariste des blessures graves à la tête en cas de renversement latéral ou même frontal. La démonstration de leur efficacité pour éviter l’expulsion lors de renversements dynamiques est une question complexe qui nous apparaît difficile de circonscrire à 100%, car il existe une infinité de cinématiques de renversement de chariots. Certains systèmes peuvent s’avérer efficaces dans certaines conditions de renversement, mais inutiles dans d’autres. Les portes complètes empêchent évidemment le cariste de sortir ou d’être expulsé de l’habitacle, mais elles n’aident pas à éviter ou à limiter les impacts de la tête sur le FOPS. En effet, lors d’un renversement latéral, le cariste maintient sensiblement sa position relative par rapport au chariot jusqu’à ce que le FOPS entre en contact avec le sol. À partir de ce moment, le cariste poursuit sa chute et entre en contact avec le sol ou la porte, selon le type de porte installée.
Contrairement à ce qui est véhiculé depuis plusieurs années, le port de la ceinture de sécurité n’entraîne pas une augmentation significative de la vitesse d’impact du corps ou de la tête au sol. En effet, grâce à la modélisation, nous avons prouvé que le port de la ceinture pelvienne contribue à une augmentation de 11% de la vitesse d’impact tandis que les résultats expérimentaux démontrent une augmentation se situant entre 10 et 25 %. Cette augmentation de 11 % correspond à une différence de 2 km/h entre la vitesse d’impact sans ceinture (17 km /h) et avec ceinture (19 km/h). Selon les données recueillies dans la littérature, le seuil de 17 km/h obtenu pour le cas d’un renversement quasi-statique sans ceinture de sécurité serait déjà au-delà du seuil acceptable (16 km/h) pour éviter des lésions graves à la tête. Cette observation supporte donc le concept d’utiliser un système de protection à la tête, même lorsqu’une ceinture est portée.
Les actions prescrites par les manufacturiers sur le cramponnage au volant et le calage des pieds peuvent également contribuer à la sécurité lors du renversement, mais elles ne sont pas, à elles seules, un moyen de protection efficace contre les blessures graves. Il sera en effet impossible pour le cariste de se retenir dans certaines situations de renversement à grande vitesse. Dans le meilleur des cas (renversement quasi-statique avec port de la ceinture), se cramponner au volant permettrait de faire passer la vitesse d’impact de la tête de 20 km/h à 13 km/h. Dans le cas où le renversement s’effectuerait plus rapidement, les vitesses passeraient de 23 km/h à 16 km/h. Même si les actions de cramponnage au volant ou de calage des pieds doivent être encouragées, il est illusoire de croire qu’un cariste sera en mesure de se cramponner à temps ou avec suffisamment de force dans toute situation de renversement.
Bien que notre étude se soit concentrée sur le renversement latéral, nous croyons que les recommandations précédentes sont applicables à l’analyse de la sécurité lors des renversements frontaux. Nos conclusions et recommandations sont présentement basées sur des résultats expérimentaux et des modèles de renversements quasi-statiques. Afin de pouvoir évaluer tout autre système de sécurité dans toute situation de renversement, il est essentiel de poursuivre le développement d’un modèle dynamique de renversement sur plateforme de simulation MADYMO ou autre. Étant donné les investissements réalisés par le passé sur la plateforme MADYMO, nous proposons de poursuivre sur cette plateforme, d’autant plus que la plateforme s’est montrée très efficace pour simuler les cas de renversements quasi-statiques effectués à l’INRS.
ISBN
9782896312160 (PDF)
9782896312153 (version imprimée)
Mots-clés
Chariot automoteur, Industrial truck, Chariot élévateur à fourche, Fork-lift truck, Ceinture de sécurité, Safety belt, Modèle, Model, Laboratoire d'essai, Test laboratory, Simulation, Renversement, Évaluation des résultats, Recommandation, Directive, Québec
Numéro de projet IRSST
0099-2970
Numéro de publication IRSST
R-541
Citation recommandée
Bourret, P.-É., Martel, S., Koutchouk, M., Roux, M.-A., Gou, M., Aubin, C.-É. et Rancourt, D. (2008). Sécurité des chariots élévateurs : étude de l'efficacité de la ceinture de sécurité (Rapport n° R-541). IRSST. https://pharesst.irsst.qc.ca/rapports-scientifique/489
