Type de document
Rapports de recherche scientifique
Année de publication
2008
Langue
Anglais
Résumé
Malgré une quantité impressionnante de données empiriques démontrant les conséquences néfastes du stress au travail sur la santé des individus et des organisations, il existe peu d’évidences scientifiques sur le processus d’implantation et l’efficacité des interventions visant à prévenir le stress au travail. Plusieurs revues de la littérature scientifique sur les programmes de prévention du stress au travail montrent la dominance des programmes de prévention centrés sur l’individu (DeFrank & Cooper, 1987; Van Der Hek & Plomp, 1997). Les effets associés à ce type d’intervention sont généralement limités et de durée plutôt courte (Bunce, 1997; Murphy, 1996). En ce qui concerne les interventions prévenant le stress à la source, il existe peu d’évidences scientifiques permettant d’identifier les stratégies les plus efficaces pour réduire le stress au travail et sur les façons adéquates de mettre en œuvre ces interventions afin d’atteindre les résultats désirés (Cooper et al., 2001).
Ce rapport présente les résultats d’une recherche évaluant la mise en place d’interventions organisationnelles en prévention du stress au travail. L’étude visait deux objectifs :
- documenter et améliorer, en partenariat avec les milieux de travail, les démarches de prévention des problèmes de santé mentale au travail mises sur pied à la lumière des résultats de la première phase de recherche ;
- dans le cadre d’un devis quasi-expérimental avec mesure avant et après l’intervention et groupe de comparaison, évaluer l’efficacité des interventions afin de réduire l’exposition aux sources de stress et améliorer la santé psychologique.
La collecte des données a été réalisée au moyen de questionnaires, d’entrevues semi-dirigées, d’entretiens focalisés, d’observations participants et d’un accompagnement de 18 mois auprès de trois organisations : un établissement d’enseignement supérieur, un centre hospitalier et des établissements du secteur forestier public.
LES FAITS SAILLANTS DU SUIVI DES INTERVENTIONS SONT LES SUIVANTS :
- Les données administratives sur l’absentéisme sont très utiles puisqu’elles éclairent les décisions en début et pendant les interventions préventives.
- Lorsque les données administratives ne sont pas disponibles, un sondage sur le stress au travail « stress audit » s’avère aussi un choix judicieux.
- Si aucune donnée administrative ou d’enquête par sondage n’est disponible, le recours à des informations subjectives peut permettre de cibler les unités plus à risque.
- L’engagement de la direction est un processus qui doit faire l’objet d’une attention particulière et qui doit être reconfirmé régulièrement tout au long du projet.
- L’incorporation des enjeux de santé au travail dans les orientations stratégiques impose une reddition de compte de la direction envers le personnel et envers le conseil d’administration.
- La volonté et le sérieux d’une organisation à mettre en place des changements visant la réduction du stress au travail sont considérés beaucoup plus crédibles et réalisables lorsqu’un budget spécifique est octroyé.
- L’engagement des parties se mesure par la volonté de dépasser le diagnostic (i.e. sondage, « focus group », etc.) et d’implanter des structures, des programmes ou des interventions spécifiques.
- Il est important de soutenir les cadres de premier niveau et intermédiaires dans l’implantation des activités puisqu’ils sont souvent considérés par les employés comme la source des problèmes, ce qui peut être très menaçant pour eux.
- L’engagement et la participation du syndicat est une valeur ajoutée aux interventions et augmente la crédibilité des activités proposées.
- La participation des employés ne doit pas se limiter à la mise en place des actions, elle doit prendre forme beaucoup plus en amont dès l’identification des risques et des solutions.
- Il est essentiel de mettre en place des actions qui se situent dans un échéancier à long terme, mais aussi des actions, plus simples, qui peuvent être réalisées à très court terme.
- La conduite d’une intervention visant l’amélioration des conditions d’exercice du travail peut faire face à certaines opinions défavorables et il importe d’implanter rapidement des actions concrètes et s’assurer de la diffusion d’information sur ces réalisations.
- Peu de soutien est offert aux membres des comités lors de situations délicates (i.e. rencontres d’employés pour présenter le projet, animation de groupe de résolution de problèmes, etc.). À ces occasions, le soutien d’un expert est généralement fort apprécié.
- La sélection du pilote de projet, en fait le responsable du comité de pilotage, est un élément clef de la réussite des interventions. Cette personne doit posséder des qualités de leader, être très efficace, détenir des compétences en gestion de projet et user de stratégies pour faire face aux résistances des employés et des gestionnaires.
Le bilan de l’intervention dans l’établissement d’enseignement est extrêmement positif. Dans l’unité A, 14/16 facteurs de risque se sont améliorés ; la satisfaction au travail a augmentée et une réduction importante de la détresse psychologique a été mesurée (56,1% VS 25,9%). Dans l’unité B, 14/16 facteurs de risque se sont aussi améliorés ; on constate davantage de soutien social en milieu de travail, une plus grande satisfaction au travail, une intention moindre de quitter l’emploi et une diminution du pourcentage d’employés rapportant une détresse psychologique élevée (43,6% VS 33,6%). Dans le projet C, seulement 5/16 facteurs de risque se sont bonifiés ; les employés présentent une légère augmentation du soutien social et une diminution de la détresse psychologique (41,4% VS 32,5%). Dans le groupe de comparaison, uniquement 5/16 facteurs de risque se sont légèrement améliorés et aucun changement significatif n’a été noté en ce qui concerne les indicateurs de bien-être.
Concernant le bilan du centre hospitalier, les changements au plan quantitatif sont, là aussi, très positifs. Dans l’unité D, 15/16 facteurs de risque se sont améliorés. Les employés présentent des changements positifs sur les indicateurs de satisfaction au travail, d’épuisement professionnel et de détresse psychologique (68,3% VS 37,8%). Dans l’unité de comparaison, seulement 6/16 facteurs de risque se sont améliorés et aucune amélioration ou détérioration significative des indicateurs de bien-être n’est observée.
Enfin, les actions préventives mises en place dans les établissements du secteur forestier semblent avoir eu un impact modéré. Dans l’unité E, 12/17 facteurs de risque se sont améliorés et il n’y a aucune variation significative des indicateurs de bien-être. Dans l’unité F, 9/17 facteurs de risque se sont améliorés et là aussi aucune variation significative des indicateurs de bien-être n’est observée. Dans l’unité G, 10/17 facteurs de risque se sont améliorés, mais il n’y a pas de variation significative des indicateurs de bien-être.
Ce rapport de recherche fait état des principaux obstacles à l’intervention. Les éléments suivants sont discutés : la charge de travail trop lourde des gestionnaires, les difficultés d’intervention sur l’organisation du travail, le changement du pilote de projet, le manque d’habiletés de certains gestionnaires, l’opinion négative des employés et des gestionnaires sur les interventions, la mise en place simultanée de plusieurs actions, le délai d’implantation des interventions trop long et la démarche trop orientée sur la baisse de l’absentéisme.
Finalement, les principaux éléments facilitant l’intervention discutés sont : l’approche stratégique des risques, le soutien financier, le soutien aux gestionnaires lors des changements, l’intégration des interventions dans le cadre de projet organisationnel plus large, la structuration forte et les rencontres régulières du comité de pilotage, la collaboration étroite et le lien de confiance avec les représentants de la gestion des ressources humaines, l’approche participative tout au long de la démarche, l’établissement d’un calendrier d’intervention à court, moyen et long terme, la mise en évidence de quelques problèmes concrets et la publication rapide et adéquate des réalisations.
Abstract
Despite an impressive amount of empirical data showing the adverse effects of stress in the workplace on the health of individuals and on organisations, there is little scientific evidence on how to prevent it effectively. Indeed, scientific evidence on the causes of stress at work (i.e. psychosocial risks such as low job control, high workload, role conflicts or low social support) is convincing. However, studies on the process of introducing organisational interventions to prevent stress in the workplace and on their effectiveness are still scarce. A number of reviews of scientific literature on workplace stress prevention programmes show the dominance of prevention programmes which focus on the individual (DeFrank & Cooper, 1987; Van Der Hek & Plomp, 1997, Giga, Cooper & Faragher, 2003). Although they can be very useful, interventions focussed on individuals deal with the effect of stress instead of preventing it. Moreover, without ongoing support, the benefits associated with this type of intervention are likely to be temporary (Giga, Cooper & Faragher, 2003). As for interventions which aim to target stress at its source by intervening on psychosocial risks in the workplace, there is much less scientific evidence, although the existing results seem more promising. In order to prevent stress effectively, we need to identify the most effective strategies and appropriate means of implementing such interventions in order to achieve the desired results.
Given this gap in stress intervention research, this research had two objectives:
- Assisting organisations in order to document the development and implementation process of interventions to prevent work-related stress;
- Evaluating the effectiveness of stress interventions aiming at reducing the exposure to psychosocial risks in the workplace, and in improving psychological health and wellbeing.
The study was conducted in three organisational settings (a higher education establishment, a hospital centre and business units in the public forestry sector). Within these three settings, a total of seven different intervention projects were monitored and evaluated. Questionnaires measuring sources of stress (i.e. psychosocial risks factors such as workload, low job control, job insecurity) and consequences of stress on wellbeing (e.g. psychological distress, job dissatisfaction, etc.) were completed by participants before the beginning of the interventions and 18 months later. Comparison groups (who were not exposed to any specific interventions) were used in four of the projects. After the first questionnaire was completed, employees and managers identified various sources of stress in their work and suggested solutions. These solutions were analysed by joint committees during which an action plan was drafted and implemented to address the stressors identified by employees. A total of 1613 questionnaires were completed (832 employees completed the pre-intervention questionnaire, and 781 completed the post-intervention one). Moreover, 266 persons were met in individual or group interviews. Finally, we monitored the development and implementation of interventions during a period of 18 months by attending meetings relevant to stress and psychological health at work within each participating units.
In this report, we will describe and evaluate the effectiveness of each project and discuss the main issues (facilitators and obstacles) which were encountered in the development and the implementation of the interventions.
ISBN
9782896312931 (PDF)
9782896312924 (version imprimée)
Mots-clés
Santé mentale, Mental health, Stress, Organisation de la prévention dans l'entreprise, Plant safety and health organisation, Évaluation du risque, Hazard evaluation, Aspect psychosocial, Psychosocial aspect, Enseignement supérieur, Higher education, Hôpital, Hospital, Exploitation forestière, Logging, Programme de prévention, Health and safety program, Évaluation des résultats, Evaluation of results
Numéro de projet IRSST
0099-2400
Numéro de publication IRSST
R-577
Citation recommandée
Brun, J.-P., Biron, C. et Ivers, H. (2008). Strategic approach to preventing occupational stress (Rapport n° R-577). IRSST. https://pharesst.irsst.qc.ca/rapports-scientifique/514
