Type de document
Rapports de recherche scientifique
Année de publication
1995
Langue
Français
Résumé
Objectif général
Évaluer la validité de trois technologies, soit la spinoscopie, lа dynamométrie triaxiale (B-200) et la thermographie, pour diagnostiquer une lombalgie récente chez des travailleurs.
Objectifs spécifiques
Déterminer les caractéristiques diagnostiques de chacune des trois technologies avec et sans les données cliniques, comparer les technologies entre elles, évaluer l'influence de la motivation des sujets sur la précision diagnostique chacune et déterminer la reproductibilité des résultats selon chacun des utilisateurs des technologies.
Méthode
Dans un premier temps, une étude portant sur les valeurs normales de sujets sains (phase I) a été réalisée afin de permettre à chaque technologie de se calibrer, aux participants de se familiariser avec la méthode et à l'équipe de recherche de s'assurer du déroulement optimal de la phase II.
La phase II a ensuite été réalisée avec l'objectif d'évaluer la capacité de ces technologies à poser un diagnostic de lombalgie.
Deux médecins spécialistes expérimentés (médecins sélectionneurs) ont été appelés à constituer un étalon de référence (gold standard) selon des critères d'inclusion et d'exclusion cliniques permettant de classer les sujets en deux groupes, soit les sujets malades et les sujets en santé.
Les deux médecins sélectionneurs ont constitué un ensemble de 41 malades présentant un premier épisode de lombalgie de type entorse lombaire d'une durée de plus de quatre semaines mais ne dépassant pas 10 semaines, sans évidence clinique de discopathie, de radiculopathie ou d'anomalie radiologique.
Un ensemble de 46 sujets sains, dont ni les antécédents, ni l'examen ciinique et radiologique ne révélaient d'affection lombaire ou autre antécédent ayant requis une évaluation médicale, a été utilisé comme groupe contrôle.
Par attribution aléatoire, la moitié des malades présentant une entorse lombaire ont été formés pour dissimuler leur lombalgie et la moitié des sujets sains, pour simuler la présence d'une affection lombaire. Quatre groupes ont ainsi été constitués, soit 1) les sujets sains et honnêtes, 2) les sujets sains et simulateurs, 3) les sujets malades et honnêtes et 4) les sujets malades et dissimulateurs.
Les quatre groupes de sujets ont été soumis à une évaluation clinique individualisée à simple insu faite par deux médecins spécialistes (évaluateurs cliniques) différents des médecins sélectionneurs (servant de référence). Des techniciens certifiés, reconnus compétents et choisis par les utilisateurs des technologies, ont procédé aux examens suivants : thermographie, spinoscopie, dynamométrie triaxiale. Toutes les évaluations cliniques et les examens furent réalisés dans un ordre prédéterminé, sur une période maximale de 24 heures. Les données des technologies, portant un numéro de code servant à l'identification anonyme des sujets, ont été emmagasinées sur support informatique. Les techniciens, un pour la thermographie, un pour la dynamométrie triaxiale et deux pour la spinoscopie, ont administré les tests à simple insu et ont suivi un protocole d'enregistrement des données préétabli.
Après la répartition aléatoire de l'ordre des enregistrements et le codage des sujets, deux utilisateurs pour chacune des technologies ont interprété individuellement les données, sans avoir accès à leurs lectures précédentes. Un délai de quatre semaines a été respecté entre cette première lecture et la deuxième, lors de laquelle les utilisateurs des technologies avaient accès aux informations cliniques; les données de cette deuxième lecture ont été présentées dans un ordre aléatoire différent de celui de la première lecture. Cette deuxième lecture été immédiatement suivie du consensus des deux utilisateurs de chaque technologie sur les données des technologies combinées aux informations cliniques.
L'analyse des résultats tient compte de trois mesures de la validité, soit la méthode COR et celles de l'exactitude simple et double. Les critères objectifs de performance retenus a priori pour établir l'utilité clinique des technologies étaient une sensibilité de 85 % et une spécificité de 90 %, attendu qu'il s'agit d'une étude expérimentale donnant le maximum de chance aux technologies de performer.
La première mesure de validité, soit la méthode de la caractéristique opérationnelle des résultats (méthode COR), correspond à la situation la plus facile pour les utilisateurs des technologies et les évaluateurs cliniques.
La deuxième, la méthode de l'exactitude simple, visait à évaluer l'aptitude des technologies et de l'examen clinique à distinguer les sujets sains et malades basée sur l'état de santé seul, alors que l'indécision était considérée comme une mauvaise décision.
La troisième méthode, soit celle de l'exactitude double, avait pour but de distinguer les sujets selon l'exactitude double, soit déterminer leur catégorie d'appartenance réelle basée sur l'état de santé et le rôle dans l'un des quatre groupes : sain et honnête; sain et simulateur; malade et honnête; malade et dissimulateur.
Les pourcentages que l'on obtient pour chaque sous-groupe ou chaque technologie peuvent se comparer directement entre eux, puisqu'ils proviennent du même échantillon expérimental. Par contre, il ne faudrait pas penser retrouver de tels résultats dans une population générale, car les taux de sujets honnêtes ou tricheurs n'y seraient vraisemblement pas les mêmes, bien que ce pourcentage ne soit pas clairement établi.
Résultats
Pour l'ensemble des sujets (honnêtes, simulateurs et dissimulateurs), le B-200 obtenu un indice COR de 0,80, une valeur globale de 70,7 % à l'exactitude simple et de 39,1% à l'exactitude double; la spinoscopie, un indice COR de 0,75, valeur globale de 61,4 % à l'exactitude simple et de 38,5 % à l'exactitude double; et l'examen clinique, un indice COR de 0,74, une valeur globale de 63,8% à l'exactitude simple et de 59,8 % à l'exactitude double. La thermographie est performante, avec un indice COR de 0,33, une valeur globale de 37,9 %à l'exactitude simple et de 38,0 %à l'exactitude double. Le B-200 avec l'addition examens cliniques démontre un indice COR de 0,85, une valeur globale 73,6 % selon l'exactitude simple et de 67,3 % selon l'exactitude double, soit meilleure performance réalisée dans cette étude.
Pour le sous-groupe de sujets honnêtes, dans le même ordre de présentation, les résultats sont les suivants :
- examen clinique : indice COR de 0,99, exactitude simple de 93,2 % et double de 92,1 %;
- B-200: indice COR de 0,91, exactitude simple de 80,7 % et double de 68,1 %;
- spinoscopie: indice COR de 0,78, exactitude simple de 62,5 % et double de 59,1 %;
- thermographie : indice COR de 0,30.
Pour le sous-groupe de sujets simulateurs et dissimulateurs (malhonnêtes), les résultats sont :
- B-200: indice de 0,72, exactitude simple de 60,5 % et double de 9,3 %;
- spinoscopie: indice de 0,73, exactitude simple de 59,3 % et double de 17,5 %;
- examen clinique : indice de 0,30, exactitude simple de 32,6 % et double de 26,8 %;
- thermographie : indice de 0,38.
Conclusion
La conclusion est claire. L'emploi des technologies (thermographie, dynamométrie triaxiale et spinoscopie) à des fins diagnostiques n'est d'aucune utilité lorsqu'il s'agit de sujets sains ou lombalgiques (entorse lombaire) honnêtes. Dans l'état actuel des connaissances, l'évaluation clinique s'avère performante et suffisante lorsque le sujet est honnête et réellement malade, се qui représente probablement la majorité des lombalgiques accidentés du travail.
Par contre, si le sujet est simulateur ou dissimulateur, ni les technologies ni l'examen clinique ne peuvent actuellement distinguer de façon satisfaisante de l'état de santé de celui de maladie. En effet, malgré la performance supérieure de la dynamométrie triaxiale et de la spinoscopie à celle de l'examen clinique chez les sujets simulateurs ou dissimulateurs, ces technologies sont toutefois inaptes à distinguer de façon fiable ces sujets. Aucune méthode n'arrive à détecter adéquatement si un patient est honnête ou pas, qu'il simule ou dissimule une lombalgie.
La généralisation des résultats de la présente recherche à caractère expérimental comporte certaines limites étant donné la nature de l'échantillon utilisé. Toute généralisation doit donc tenir compte de ce facteur.
Mots-clés
Maux de dos, Backache, Diagnostic, Diagnosis, Examen médical, Medical examination, Thermographie infrarouge, Infrared thermography, Dynamomètre, Dynamometer, Technique d'évaluation, Evaluation technique, Enquête, Survey, Spinoscope
Numéro de projet IRSST
0089-0210
Numéro de publication IRSST
R-105
Citation recommandée
Leclaire, R., Esdaile, J. M., Hanley, J., Rossignol, M., Bourdouxhe, M., Jéquier, J. C. et Hajian-Tilaki, H. (1995). Evaluation clinique expérimentale de la validité d'instruments utilisés pour le diagnostic de lombalgies : spinoscopie, dynamométrie triaxiale (B-200) et thermographie, en regard de l'examen clinique (Rapport n° R-105). IRSST. https://pharesst.irsst.qc.ca/rapports-scientifique/855
