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Année de publication

2019

Langue

Français

Résumé

Les indicateurs statistiques de santé et de sécurité du travail produits depuis plusieurs années par l’Institut de recherche Robert-Sauvé en santé et en sécurité du travail (IRSST) montrent que la durée moyenne d’indemnisation des lésions professionnelles ayant occasionné une perte de temps indemnisée (PTI) a presque doublé en 15 ans, passant de 57 jours en 1995-1997 à 101 jours en 2010-2012. Alors que l’écart de durées moyennes d’indemnisation entre les femmes et les hommes s’amenuise au fil des années (les femmes ayant toujours eu une valeur supérieure à celle des hommes), celui entre chaque groupe d’âge change très peu.

La présente étude vise à identifier, pour la période 2005-2012, les facteurs les plus fortement liés aux écarts de durées moyennes d’indemnisation observés selon le sexe ou le groupe d’âge, ainsi que ceux associés à l’augmentation de la durée moyenne d’indemnisation au fil des années. Les analyses se basent principalement sur des tests de comparaison de durées moyennes d’indemnisation (test-T et ANOVA) ainsi que sur des régressions linéaires multivariées. Outre le sexe, le groupe d’âge et l’année de survenue de la lésion, les facteurs retenus incluent notamment la catégorie de dossier (accident du travail ou maladie professionnelle), la présence d’un trouble musculosquelettique (TMS), l’existence d’une atteinte permanente à l’intégrité physique ou psychique (APIPP), le paiement de certaines catégories de débours (une somme positive de débours au sein de certaines catégories comptables, dont celles de réadaptation), l’industrie, la catégorie professionnelle et la taille de l’employeur (basée sur la masse salariale assurable).

En 2005-2012, la Commission des normes, de l’équité, de la santé et de la sécurité du travail (CNESST) a reconnu et accepté plus de 105 400 lésions professionnelles en moyenne par année. De ce nombre, près de 76 % ont généré une PTI, proportion qui varie de 63 % à 80 % selon le sexe ou le groupe d’âge. Par ailleurs, les hommes comptent pour 69 % des lésions avec PTI, alors que les 25-34 ans et les 35-54 ans représentent respectivement 22 % et 50 % des cas.

Selon le sexe ou le groupe d’âge, la proportion relative de cas ayant au plus 14 jours indemnisés varie de 42 % à 60 %, alors que celle pour les cas ayant plus de 365 jours oscille de 2 % à 12 %. Il convient de noter que ces cas ayant plus de 365 jours comptent pour 60 % à 82 % des jours indemnisés. Si les femmes ont une durée moyenne d’indemnisation un peu plus élevée que celle des hommes (97,2 jours et 92,1 jours respectivement), la variation est plus importante par groupe d’âge. De 45,7 jours pour les 15-24 ans, la durée moyenne d’indemnisation atteint 137,4 jours pour les 55 ans et plus.

Pour l’analyse portant sur l’identification des principaux facteurs à l’origine des écarts observés entre les sexes et les groupes d’âge, bien qu’il y ait une différence statistiquement significative pour la très grande majorité des facteurs, la taille d’effet associée est généralement très faible, voire nulle. L’existence d’une APIPP, le recours à la réadaptation ainsi que la catégorie comptable associée au versement de débours d’indemnités de remplacement du revenu (IRR) ou de frais d’assistance médicale constituent les facteurs les plus fortement associés à la durée d’indemnisation. L’utilisation d’une régression linéaire multivariée montre que la présence de réadaptation est le principal facteur associé à la durée d’indemnisation des lésions professionnelles avec PTI. Le deuxième facteur est la présence de débours d’IRR en raison de la non-disponibilité d’un emploi convenable.

Bien qu’elle n’ait pas été considérée en tant que telle comme un facteur, la répartition relative (la structure) des lésions avec PTI propre à chaque sexe ou groupe d’âge selon l’un ou l’autre des facteurs montre parfois des éléments expliquant les écarts observés. À cet effet, grâce à des simulations pour lesquelles les différences de répartition par sexe ou par groupe d’âge sont contrôlées (éliminées) pour les facteurs analysés, des durées moyennes d’indemnisation standardisées ont été calculées. Les écarts de durées moyennes d’indemnisation entre sexes et groupes d’âge qui en découlent sont généralement plus petits que ceux observés. Cela indique que les écarts de durée observés entre sexe ou groupe d’âge découlent principalement d’une différence dans la répartition relative des lésions selon les facteurs analysés.

Pour la simulation contrôlant les différences de proportion de lésions avec des débours de réadaptation, la durée moyenne d’indemnisation standardisée des femmes est légèrement inférieure à celle des hommes, ce qui est l’inverse des valeurs observées. Pour les groupes d’âge, bien que les écarts demeurent, ils sont bien moindres que ceux observés. En contrôlant simultanément la structure de plusieurs facteurs, la durée moyenne d’indemnisation standardisée des femmes est environ 3 jours inférieure à celle des hommes, tandis que l’écart entre les 15-24 ans et les 55 ans et plus n’est plus que de 19 jours, soit nettement moins que les 90 jours observés. Ainsi les différences de répartition par catégorie, pour les facteurs analysés, expliquent la plus grande part des écarts entre les durées d’indemnisation observées des femmes et des hommes, et entre celles des groupes d’âge.

Il ressort de toutes ces simulations que la durée moyenne d’indemnisation supérieure des femmes, comparée à celle des hommes, est fortement associée à une proportion plus élevée de lésions comportant des débours de réadaptation pour les femmes (8,4 %) que celle des hommes (7,3 %). Cela vaut également pour les groupes d’âge, les 15-24 ans ayant une proportion de lésions avec des débours de réadaptation largement inférieure à celles des 55 ans et plus (2,6 % contre 11,3 %). Cela étant, il convient de mentionner que la durée moyenne d’indemnisation des cas ayant eu de la réadaptation est l’une des rares à avoir diminué de 2005 à 2012, ce qui a contribué à modérer l’augmentation de la durée moyenne d’indemnisation.

En ce qui concerne l’analyse de l’évolution de la durée moyenne d’indemnisation de 2005 à 2012, les tests statistiques montrent que la force de l’association entre l’année de survenue de la lésion et la durée moyenne d’indemnisation, bien que statistiquement significative, est minime. Devant ce constat, de nouvelles durées moyennes standardisées ont été calculées selon les différents facteurs analysés, cette fois en contrôlant le changement observé de 2005 à 2012 de la répartition relative des lésions par sexe ou par groupe d’âge. Il ressort que le changement de la proportion de lésions ayant généré des débours de réadaptation et celle des cas avec APIPP ont contribué le plus à l’augmentation de la durée moyenne d’indemnisation au fil des années. Globalement, n’eussent été des changements dans la répartition des lésions avec PTI selon les différents facteurs, la durée moyenne d’indemnisation par sexe ou par groupe d’âge aurait augmenté au plus de 4 jours de 2005 à 2012, plutôt que de 8 à 20 jours comme observé.

Abstract

The occupational health and safety statistical indicators that Quebec’s Institut de recherche Robert-Sauvé en santé et en sécurité du travail (IRSST) has been producing for many years show that the average duration of compensation for workplace injuries that led to time-loss compensation (TLC) has almost doubled in 15 years, going from 57 days in 1995–97 to 101 days in 2010–12. While the difference in average duration of compensation between women and men has narrowed over the years (women having always had a higher level than men), the differences between age groups have changed very little.

The purpose of this study was to identify, for the period 2005–12, the factors most strongly related to the differences observed in average duration of compensation, by sex and age group, as well as those associated with the increase in average duration of compensation over time. The analyses are based primarily on comparison tests (t test and ANOVA) for average duration of compensation, as well as on multivariate linear regressions. In addition to sex, age group and year injury occurred, the other factors examined included the type of case (workplace accident or occupational disease), whether there was a musculoskeletal disorder (MSD), whether there was any permanent physical or mental impairment (PPMI), the payment of certain categories of disbursements (a positive amount of disbursement within certain accounting categories, including rehabilitation), the industry, the occupational category and the size of the employer (based on insurable payroll).

In 2005–12, Quebec’s Commission des normes, de l’équité, de la santé et de la sécurité du travail (CNESST) acknowledged and accepted over 105,400 occupational injury claims on average per year. Of this number, close to 76% led to TLC, a proportion that ranged from 63% to 80%, depending on sex or age group. Furthermore, men accounted for 69% of injuries with TLC, while 25-to-34-year-olds and 35-to-54-year-olds represented 22% and 50% of cases respectively.

Depending on sex or age group, the relative proportion of cases receiving at least 14 days’ compensation varies from 42% to 60%, whereas the proportion for cases having over 365 days ranges between 2% and 12%. Note that the cases with over 365 days account for 60% to 82% of all compensated days. While average duration of compensation is slightly higher for women than for men (97.2 days as opposed to 92.1 days), the variation between age groups is greater. From 45.7 days for 15-to-24-year-olds, average duration of compensation rises to 137.4 days for 55-and-overs.

In the analysis aimed at identifying the main factors involved in the observed differences between the sexes and age groups, although there is a statistically significant difference for the vast majority of factors, there is little or no associated effect. The existence of a PPMI, the need for rehabilitation and the accounting category associated with the payment of income replacement benefits (IRBs) or medical assistance fees constitute the factors most strongly associated with the duration of compensation. Multivariate linear regression analysis shows that rehabilitation is the main factor associated with the duration of compensation for occupational injuries with TLC. The second factor is the payment of IRBs owing to the unavailability of a suitable job.

Although not considered as a factor as such, the relative distribution (structure) of injuries with TLC specific to each sex or age group, according to one factor or another, sometimes reveals components that explain the observed differences. To this end, through simulations for which the differences in distribution by sex or age group were controlled (eliminated) for the factors analysed, standardized average durations of compensation were calculated. The resulting differences in average duration of compensation between the sexes and age groups are generally smaller than those observed. That indicates that the observed differences in duration between the sexes or age groups are mainly due to a difference in the relative distribution of injuries according to the factors analysed.

In the simulation controlling for differences in the proportion of injuries with rehabilitation disbursements, the standardized average duration of compensation for women is slightly lower than that for men, which is the reverse of the observed values. For age groups, although there are still differences, they are smaller than the observed ones. In controlling simultaneously for the structure of several factors, the standardized average duration of compensation for women is about 3 days less than for men, whereas the difference between 15-to-24-year-olds and 55-and-overs is only 19 days, which is far less than the observed 90 days. So the differences in distribution by category, for the factors analysed, explain most of the differences between the compensation durations observed for women and men, and between those for the different age groups.

All these simulations show that the greater average duration of compensation for women, compared with men, is strongly associated with a higher proportion of injuries involving rehabilitation disbursements for women (8.4%) than for men (7.3%). This is also true for age groups, with 15-to-24-year-olds having a proportion of injuries with rehabilitation disbursements far below that of 55-and-overs (2.6% versus 11.3%). That being said, it should be noted that the average duration of compensation of cases having had rehabilitation is one of the only categories to have declined from 2005 to 2012, which helped to mitigate the increase in average duration of compensation.

As for the analysis of changes in average duration of compensation from 2005 to 2012, the statistical tests show that the strength of the association between the year the injury occurred and the average duration of compensation, while statistically significant, is minimal. Given this result, new standardized average durations were calculated according to the different factors analysed, this time controlling for the change observed between 2005 and 2012 in the relative distribution of injuries by sex or age group. The analysis shows that the change in the proportion of injuries that required rehabilitation disbursements and that in the share of cases with PPMI were the two biggest contributing factors to the increase in average duration of compensation over the years. Overall, if it weren’t for the changes in the distribution of injuries with TLC according to various factors, average duration of compensation by sex or age group would have increased at most by 4 days from 2005 to 2012, rather than by 8 to 20 days as observed.

ISBN

9782897970536

Mots-clés

Réparation-accidents et maladies, Work compensation, Aspect économique-accidents et maladies, Economical aspect-accidents and diseases, Différence liée au sexe, Sex difference, Différence liée à l'âge, Age difference, Taux de fréquence, Frequency rate, Taux de gravité, Severity rate, Analyse des données, Data analysis, Québec

Numéro de projet IRSST

2015-0031

Numéro de publication IRSST

R-1046

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