Type de document

États de la question, rapports d'expertise et revues de littérature

Année de publication

1988

Langue

Français

Résumé

Des statistiques d'accidents pour la première moitié de 1983, des entrevues et observations que nous avons réalisées sur les lieux du travail et de l'enquête par questionnaire faite auprès de 538 chauffeurs d'autobus, les faits suivants ressortent:

  • Une majorité de chauffeurs ressentent des malaises au bas du dos (59%) et, dans une proportion moindre, au milieu du dos (39%), aux reins (46%), aux fesses (42%), au haut du dos (34%) et au cou (36%). Le pourcentage de chauffeurs qui disent avoir mal au dos, surtout au niveau lombaire, est considérable et il nous incite à émettre I'hypothèse que les accidents de travail affectant le dos pourraient être le reflet d'une condition musculosquelettique latente, probablement sous-jacente à de nombreux accidents au dos.
  • Les réponses aux questionnaires indiquent que les chauffeurs placent leurs dos en position arrondie (cyphose). La posture adoptée implique parfois ou souvent une cyphose dorsale (36%) ou une cyphose dorsale et lombaire (54%).
  • Par ailleurs, l'analyse des comportements posturaux nous incite à croire que même si de nombreux chauffeurs adoptent une posture en cyphose, ce choix ne semble pas délibéré. Cette posture serait "générée" par un phénomène de glissement du corps vers l'avant de l'assise: plusieurs chauffeurs se sentent glisser vers l'avant (41%), cherchent continuellement à se redresser sur leur siège (76%), n doivent régulièrement tirer sur la fourche de leur pantalon pour la remettre en place (65%).
  • Lorsqu'ils sont assis sur un siège sans appui lombaire, 43% des répondants mettent souvent ou parfois un avant-bras derrière leur dos. Ce comportement laisse croire que la posture en cyphose "fait mal" et qu'en plaçant le dos en lordose lombaire (grâce à l'insertion de l'avant-bras) les chauffeurs sont temporairement soulagés. La recherche d'une posture confortable est aussi mise en évidence par le pourcentage de chauffeurs qui utilise un coussin portatif pour leur confort postural (31%).
  • L'ensemble des questions objectives et subjectives relatives entre autres aux caractéristiques de réglage ou de suspension du siège et à l'aménagement spatial du poste permet d'avancer I'hypothèse que ces éléments ne correspondent pas aux besoins anthropodimensionnels d'un pourcentage important des chauffeurs.
  • Par ailleurs, l'analyse des statistiques d'accidents imputent la majorité des causes d'accidents au dos à trois facteurs principaux: il s'agit de chute dans l'escalier, du passage de l'autobus sur une protubérance routière, et de l'ajustement du siège. La mauvaise qualité de la suspension n'apparaît que dans 6,3% des causes d'accidents au dos; l'inconfort du siège n'est jamais mis en cause. La différence qui semble exister entre les résultats de l'enquête et les données d'accidents pourrait être imputée à la méthodologie utilisée dans la rédaction des rapports d'accidents: les facteurs patents d'accidents semblent surestimés par rapport aux facteurs latents.
  • L'importance des accidents par chute dans l'escalier (26%), davantage présent lors de la descente (73% des chutes), s'interprète difficilement. Plusieurs hypothèses peuvent être avancées pour expliquer ce phénomène. Les réponses fortement positives à certaines questions de l'enquête telles que celles relatives aux engourdissements dans les cuisses et les genoux (20-25%), probablement causés par les vibrations et la posture statique des jambes, au comportement de précipitation dans l'escalier (79%) et à la rétention urinaire prolongée (69%), pouvant provoquer une gêne dans la marche pourraient expliquer en partie cette propension aux chutes. L'encombrement de l'aire de circulation peut également être une cause des chutes en descente puisque 30% d'entre elles surviennent à l'occasion d'un "accrochage" sur une des composantes de l'autobus.
  • L'importante prévalence des accidents au dos causés par le passage de l'autobus sur une protubérance routière (38%) peut mettre en cause le circuit routier de la ville de Montréal. Mais on peut également s'interroger sur la qualité de la suspension de l'autobus de même que sur celle du siège lui-même. De plus, la posture en cyphose adoptée par les chauffeurs les rend davantage vulnérables à ce type d'accidents.
  • Les chauffeurs semblent préoccupés par les conditions de sécurité visuelle. Cet aspect de la problématique inhérente au poste n'a pas fait l'objet d'une thématique spécifique dans l'élaboration du questionnaire. Cependant environ 30% des commentaires exprimés à la fin du questionnaire concernent directement ou indirectement cet aspect de leur travail. D'autres caractéristiques du poste, notamment les conditions de chauffage et d'aération sont jugées insatisfaisantes par une majorité de répondants (56% en moyenne).
  • Plus de 79% des chauffeurs se sentent pressés lorsqu'ils descendent prendre un café, 84% "sautent parfois un repas" et 69% "se retiennent d'aller aux toilettes" plus de trente minutes. Ces impacts du contexte organisationnel de l'activité du chauffeur devraient sans doute être approfondis. II serait intéressant de vérifier notamment si les troubles digestifs mentionnés dans l'étude préliminaire du docteur Thériault sont en partie causés par ces aspects des conditions de travail des chauffeurs.
  • L'insatisfaction des chauffeurs est surtout présente dans la catégorie des 30-40 ans. Cette même catégorie est aussi celle où les chauffeurs expriment ressentir le plus de malaises au dos.

Mots-clés

Communauté urbaine de Montréal. Société de transport, Autobus, Bus, Aspect statistique des accidents du travail, Statistical aspect of occupational accidents, Enquête par questionnaire, Questionnaire survey, Maux de dos, Backache, Posture de travail, Work posture

Numéro de projet IRSST

0085-0300

Numéro de publication IRSST

B-015

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