Type de document

Rapports de recherche scientifique

Année de publication

2018

Langue

Français

Résumé

De récentes études ont mis en évidence que les travailleurs des mines d’or du Dakota et des mines de fer du Minnesota sont exposés à des particules minérales allongées (PMA). En particulier, les mineurs du Minnesota présentent un risque plus élevé de décès par cancer du poumon, par mésothéliome et par maladies cardiaques que la population générale. Comme l’intérêt renouvelé pour l’exploration de nouveaux gisements d’or et de fer dans le Nord-du-Québec laisse entrevoir une augmentation du nombre de travailleurs dans ces secteurs, il s’imposait de procéder à une première appréciation de ces milieux. Dans le but d’évaluer l’état des connaissances sur la présence des PMA dans les mines d’or et de fer du Québec et de déterminer leur contribution potentielle dans l’étiologie des cancers et des maladies pulmonaires, une étude intégrant différentes méthodes et disciplines a été entreprise pour répondre aux objectifs spécifiques suivants : (1) dresser le bilan des études épidémiologiques sur les cancers et les maladies pulmonaires chez les travailleurs des mines d’or et de fer; (2) réaliser le bilan des connaissances sur la toxicité des poussières de ces mines, en particulier des PMA amiantiformes et non amiantiformes; (3) décrire la géologie des mines d’or et de fer mondiales ayant fait l’objet d’études sanitaires et la comparer à celle des mines québécoises.

Une analyse des articles de la littérature internationale portant sur les agents fibrogènes et cancérogènes (et leurs niveaux d’exposition) dans les mines d’or et de fer a d’abord été réalisée. Cette analyse a identifié certaines régions pour lesquelles des cancers et des maladies pulmonaires d’origine professionnelle ont été rapportés chez les mineurs. En parallèle, une analyse des études toxicologiques portant principalement sur les PMA a fait ressortir différents paramètres de toxicité de ces particules. Une autre revue de la littérature a ensuite documenté les différents contextes géologiques des mines d’or et de fer des pays et régions identifiés dans les études épidémiologiques et une dernière recherche documentaire a exploré la présence de PMA d’amphiboles dans les mines d’or et de fer du Québec. Ces informations ont ensuite été complétées par la caractérisation minéralogique d’échantillons provenant des mines d’or et de fer québécoises pour déterminer si ces mines sont susceptibles de contenir des PMA d’amphiboles.

Les constats suivants ressortent de la revue des études épidémiologiques internationales. L’exposition à la silice est mentionnée dans toutes les études, tant pour les mines d’or que de fer, alors que le radon, l’arsenic ou les fumées de moteurs diesels ne sont signalés que dans une partie de ces études. L’exposition à des PMA n’a été mesurée ou estimée que dans deux études sur les mines d’or et une étude sur les mines de fer (taconite).

Pour les mineurs d’or, une augmentation statistiquement significative du risque de décéder d’un cancer du poumon a été mise en évidence, en association avec la durée de travail, l’empoussièrement général, la concentration de silice cristalline dans l’air et le travail en mines souterraines. Une augmentation du nombre de mésothéliomes (cancer généralement associé à l’exposition à l’amiante), de certains cancers des organes hématopoïétiques, de la prostate, de l’estomac et du colon, ainsi que du rectum a également été trouvée, mais en moindre proportion. Quant aux maladies respiratoires non cancéreuses, seules la silicose et les « pneumoconioses sans précision » montrent un risque élevé dans la majorité des études. Les deux études portant une attention particulière aux PMA n’ont pas trouvé de relation entre l’exposition aux poussières contenant des fibres et les cancers ou les maladies pulmonaires non cancéreuses.

Pour les mineurs de fer, une augmentation statistiquement significative du risque de décéder d’un cancer du poumon a été mise en évidence, en association avec la durée de travail et l’exposition à la silice, au radon et aux émissions de moteurs diesels. Une augmentation du nombre de mésothéliomes avec la durée d’emploi dans les mines de taconite et avec l’exposition cumulative aux PMA a été montrée dans les études américaines. Une augmentation de certains autres cancers (estomac, prostate, vessie, voies aérodigestives) a aussi été rapportée, mais disparaissait après ajustement pour le tabagisme. Quant aux maladies respiratoires non cancéreuses, un excès d’anomalies de la plèvre a été rapporté en association avec l’exposition cumulative aux PMA, et de décès par pneumoconiose et par bronchite chronique en association avec l’exposition à la silice. Les études américaines ont mis en évidence une augmentation du risque chez les travailleurs des mines de taconite, mais la relation entre l’exposition aux PMA et le risque de cancer du poumon n’existait plus après ajustement pour le sexe, l’exposition à la silice et à l’amiante et le travail dans les mines d’hématite.

Le contexte géologique des mines d’or québécoises rend la présence de PMA d’amphiboles très probable (ces mines se situent dans des ceintures de roches vertes archéennes). En effet, les PMA d’amphiboles de la série actinolite-trémolite sont des minéraux caractéristiques du faciès métamorphique atteint par les basaltes se retrouvant en abondance dans ces ceintures. La différence majeure entre le contexte québécois et celui du Dakota (où des PMA ont été mesurées) est l’association spatiale systématique entre les PMA d’amphiboles et le minerai exploité dans les mines d’or situées près de formations de fer (typiques du Dakota), alors que cette association est possible, mais pas systématique, pour les mines d’or québécoises. Quant au contexte géologique des mines de fer québécoises, il est légèrement différent de celui des mines de fer américaines pour lesquelles des problèmes de santé reliés aux PMA d’amphiboles ont été rapportés. Même si les formations de fer des mines du Minnesota et du Québec se sont produites à la même période et sur la même marge continentale, des différences de métamorphisme entre les deux font que la formation de PMA d’amphiboles est plus probable au Minnesota. Dans les deux cas cependant une association spatiale systématique entre les PMA d’amphiboles et le minerai exploité est attendue. La revue de la littérature sur les sites miniers a confirmé les hypothèses déduites de leurs contextes géologiques : des PMA d’amphiboles de type actinolite ont été rapportées dans six des neuf mines d’or actives, dans trois des dix mines d’or fermées et dans deux des trois mines de fer actives, au Québec.

L’étude minéralogique de onze mines d’or et de deux mines de fer québécoises, actives ou fermées, a révélé la présence de PMA d’amphiboles dans huit d’entre elles. Une morphologie en aiguille a aussi été observée dans sept de ces mines. Contrairement aux mines canadiennes et à celles de Homestake et du Minnesota, où la grunérite est la principale source de PMA d’amphiboles, l’actinolite est la plus présente dans les sites miniers québécois. Il faut toutefois souligner que les échantillons des sites miniers étudiés n’avaient pas nécessairement été prélevés dans des zones exploitées.

En conclusion, la présence de PMA documentée dans certaines mines de fer et d’or québécoises montre qu’une exposition à ces particules est plausible. Il serait donc approprié d’effectuer des études pétrographiques systématiques dans ces mines afin d’identifier les zones susceptibles de contenir des PMA et de procéder à des mesures de fibres dans le cadre du programme d’échantillonnage de l’air. En l’absence de mesures de fibres dans les mines, il est prudent de préconiser des niveaux d’exposition les plus faibles possibles.

Abstract

Recent studies have highlighted the fact that workers in Dakota gold mines and Minnesota iron mines are being exposed to elongated mineral particles (EMPs). Moreover, Minnesota miners have a higher risk of dying from lung cancer, mesothelioma and cardiac disease than the general population. Given the renewed interest in exploring for new gold and iron deposits in northern Quebec, the number of workers in these sectors is likely to increase, and so there is a need to conduct an initial assessment of these environments. With a view to evaluating the state of knowledge about the presence of EMPs in gold and iron mines in Quebec and determining their potential role in the etiology of cancers and lung diseases, a study integrating different methods and disciplines was conducted to meet the following specific objectives: (1) carry out a survey of epidemiological studies on cancer and lung disease among gold and iron mine workers; (2) assess the state of knowledge about the toxicity of dust particles from these mines, particularly asbestiform and non-asbestiform EMPs; (3) describe the geology of world gold and iron mines where OHS conditions have been studied and compare it with that of Quebec mines.

An analysis of articles in the international literature on fibrogens and carcinogens (and exposure levels) in gold and iron mines was conducted first. This analysis identified certain regions where occupational cancers and lung diseases were reported in miners. In parallel, an analysis of toxicological studies focusing chiefly on EMPs highlighted various toxicity parameters of these particles. Another review of the literature then looked at the different geological contexts of the gold and iron mines in the countries and regions identified in the epidemiological studies, and another documentary research initiative explored the presence of amphibole EMPs in Quebec gold and iron mines. This information was supplemented by the mineralogical characterization of samples from Quebec gold and iron mines to determine whether there is a likelihood of these mines containing amphibole EMPs.

The review of international epidemiological studies led to the following observations. Exposure to silica is mentioned in all the studies, for both gold and iron mines, whereas radon, arsenic and diesel exhaust fumes are reported in only some of the studies. Exposure to EMPs was measured or estimated in only two studies on gold mines and one study on iron (taconite) mines.

For gold miners, a statistically significant increase in the risk of dying from lung cancer was highlighted, in association with length of work, general dustiness, crystalline silica concentrations in the air and work in underground mines. An increase in the number of cases of mesothelioma (cancer usually associated with exposure to asbestos), some cancers of hematopoietic organs, the prostate, stomach and colon, as well as the rectum were also found, but in lesser proportions. As for non-cancerous respiratory diseases, only silicosis and “unspecified pneumoconiosis” show a high risk in most studies. The two studies that focused in particular on EMPs did not find any relationship between exposure to fibre-containing dusts and cancers or non-cancerous lung diseases.

For iron miners, a statistically significant increase in the risk of dying from lung cancer was highlighted, in association with length of work and exposure to silica, radon and diesel exhaust emissions. An increase in the number of cases of mesothelioma with length of work in taconite mines and with cumulative exposure to EMPs has been shown in U.S. studies. An increase in some other cancers (stomach, prostate, bladder, aerodigestive tract) has also been reported, but it disappeared when the data were adjusted for tobacco use. As for non-cancerous respiratory diseases, an unusually high number of abnormalities of the pleura was reported in association with cumulative exposure to EMPs, and of deaths from pneumoconiosis and chronic bronchitis in association with exposure to silica. U.S. studies have highlighted an increased risk among taconite mine workers, but the relationship between exposure to EMPs and the risk of lung cancer no longer existed once the data were adjusted for sex, exposure to silica and asbestos, and work in hematite mines.

The geological context of Quebec gold mines makes the presence of amphibole EMPs highly probable (as the mines are situated in Archean greenstone belts). Amphibole EMPs of the actinolite-tremolite series are minerals characteristic of the basalt metamorphic facies found in abundance in these belts. The chief difference between the Quebec geological context and the Dakota context (where EMPs have been measured) is the systematic spatial association between amphibole EMPs and the ore in gold mines located near iron formations (typical of the Dakotas), whereas this association is possible, but not systematic, for Quebec gold mines. The geological context of Quebec iron mines differs slightly from that of U.S. iron mines where amphibole EMP-related health problems have been reported. Even though the iron formations found in Minnesota and Quebec mines developed at the same time and along the same continental margin, metamorphic differences between the two mean that the formation of amphibole EMPs is more likely in Minnesota. In both cases, however, a systematic spatial association between amphibole EMPs and the mined ore is to be expected. The review of the literature on the mine sites confirmed the assumptions about their geological contexts: amphibole EMPs were reported in six of the nine active gold mines and in three of the 10 closed gold mines as well as in two of the three Quebec active iron mines.

The mineralogical study of 11 gold mines and two iron mines in Quebec, some active, others closed, revealed the presence of amphibole EMPs in eight of them. An acicular morphology was also observed in seven of the mines. Unlike the Canadian mines, the Homestake Mine in South Dakota, and mines in Minnesota, where grunerite is the main source of amphibole EMPs, actinolite is the most common in Quebec mines. It should be noted, however, that the samples from the mine sites studied were not necessarily taken from mined areas.

To conclude, the documented presence of EMPs in certain Quebec iron and gold mines shows that exposure to these particles is a possibility. It would therefore be appropriate to conduct systematic petrographic studies in these mines in order to identify areas likely to contain EMPs and to take fibre measurements as part of an air sampling program. If no fibre measurements are available for the mines, it would be prudent to recommend the lowest possible levels of exposure.

ISBN

9782897970284

Mots-clés

Mine d'or, Gold mining, Mine de fer, Iron ore mining, Poussière respirable, Respirable dust, Risque d'atteinte à la santé, Health hazard, Silice cristalline, Crystalline silica, Amphibole, CAS 1318090, Substance cancérogène, Carcinogen, Mine souterraine, Underground mine, Mésothéliome, Mesothelioma, Affection cardiaque, Heart disease, Cancer du poumon, Lung cancer, Évaluation de l'exposition, Exposure evaluation, Étude comparée, Comparative study, Géologie, Effet toxique, Toxic effect, Québec, Minnesota, Dakota-du-Sud, South Dakota, Particule minérale allongée, Elongated mineral particle

Numéro de projet IRSST

2011-0024

Numéro de publication IRSST

R-1031

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