Type de document
Rapports de recherche scientifique
Année de publication
2018
Langue
Français
Résumé
Au Québec, la surdité professionnelle constitue la seconde maladie en importance, selon le nombre de cas, à être indemnisée par la Commission des normes, de l’équité, de la santé et de la sécurité du travail (CNESST). Le bruit accroît également le risque d’accidents en masquant les signaux avertisseurs, en réduisant l’intelligibilité des échanges et en augmentant la fatigue des travailleurs. Diminuer le bruit permet de réduire les cas de surdité professionnelle et les coûts qui y sont associés, mais aussi de limiter la contribution de ce facteur aux accidents du travail, tout en améliorant la qualité de vie des travailleurs. La réduction du bruit en milieu de travail peut être effectuée selon trois axes : la réduction à la source (machine moins bruyante ou encoffrement), la diminution de sa transmission (installation d’écrans ou de matériaux absorbants) ou l’atténuation (port de protecteurs auditifs ou limitation du temps d’exposition). C’est le second axe (matériaux absorbants) qui est au cœur de cette étude.
La performance d’un traitement insonorisant se traduit par un coefficient d’absorption, qui est défini théoriquement entre une valeur de 0 (matériau non absorbant) et une valeur de 1 (matériau parfaitement absorbant). Peu précise à plusieurs égards, la mesure de ce coefficient est uniquement réalisée en laboratoire. Elle est caractérisée par la grande variabilité des résultats entre les laboratoires de test et les valeurs d’absorption obtenues atteignent souvent des valeurs non physiques en pratique (supérieures à 1). Pourtant, ces valeurs servent actuellement à choisir des matériaux pour des traitements absorbants, ou pour réaliser des calculs prévisionnels de bruit (pour lesquels la principale source d’erreur reste la connaissance précise de ces coefficients).
Sur la base d’une première preuve de concept, la présente étude propose une méthode de caractérisation robuste et fiable des traitements absorbants en laboratoire et évalue son applicabilité sur le terrain, afin de pouvoir mesurer les performances réelles des matériaux après leur installation. L’approche proposée repose sur la mesure de la propagation acoustique entre une source mobile (formant une « antenne » virtuelle) et un doublet microphonique fixe à faible distance d’un échantillon du matériau testé. Dans une étape de post-traitement ultérieure, ces données sont utilisées pour obtenir le coefficient d’absorption dans des conditions de champ acoustique diffus.
Un choix de cinq matériaux typiques a tout d’abord été effectué en concertation avec le comité de suivi de cette étude. Ces matériaux ont ensuite été testés selon les méthodes normatives actuelles, soit celles de la chambre réverbérante et du tube d’impédance. Les paramètres physiques intrinsèques pertinents de chaque matériau ont également été mesurés afin de pouvoir modéliser leur absorption acoustique (paramètres dits de Johnson-Champoux-Allard, soit la résistivité au passage de l’air, la tortuosité, la porosité, la longueur caractéristique thermique et la longueur caractéristique visqueuse). Le résultat de cette modélisation a ensuite été utilisé comme solution de référence pour la valeur du coefficient d’absorption. La valeur obtenue par l’approche proposée a été comparée à cette solution de référence. Par ailleurs, des simulations par éléments finis ont permis de proposer une configuration optimale pour la dimension du matériau testé, la géométrie de l’antenne de sources et celle du doublet microphonique.
Les résultats obtenus en laboratoire (dans une chambre anéchoïque) et hors laboratoire (dans deux locaux ordinaires, en présence de réverbération et de bruit de fond) confirment le potentiel de l’approche à mesurer une absorption réaliste des divers matériaux testés, généralement en conformité avec les valeurs obtenues par simulation numérique. L’approche résulte par contre en une valeur d’absorption parfois erronée dans le domaine des basses fréquences, en raison du modèle de propagation utilisé à l’étape de post-traitement des mesures. Une piste d’amélioration de ce modèle est proposée et partiellement étudiée.
Abstract
In Quebec, occupational deafness is the second most common disease, in terms of number of cases, to be compensated by the Commission des normes, de l’équité, de la santé et de la sécurité du travail (CNESST). Noise also heightens accident risk by masking warning signals, making it harder for workers to communicate and increasing worker fatigue. Reducing noise helps not only to cut the number of cases of occupational deafness and the associated costs, but also to limit this factor’s role in workplace accidents, while improving workers’ quality of life. Noise reduction in the workplace can be achieved by three means: reducing noise at source (less noisy machinery or enclosure of machinery), decreasing noise amplitude along its propagation path (installation of acoustical barriers or materials) or acting at the level of the worker (wearing hearing protection or limiting worker exposure time). The second means (acoustical materials) is the focus of this study.
The effectiveness of a acoustical materials can be expressed in terms of an absorption coefficient, which is defined theoretically as a value between 0 (non-absorbent materials) and 1 (perfectly absorbent materials). Measurement of this coefficient, imprecise in a number of respects, can only be done in the lab. It is characterized by a large variability of results between testing laboratories, and the absorption values obtained often reach non-physical values in practice (greater than 1). Nonetheless, these values are currently used to select acoustical materials or to carry out estimated noise calculations (for which the main source of error remains the imprecise knowledge of these coefficients).
On the basis of a first proof-of-concept, this study proposes a robust, reliable method for characterizing acoustical materials in the laboratory and assesses its applicability in the field, with a view to measuring the real performances of materials after they have been installed. The proposed approach is based on measuring the acoustic propagation between a mobile source (forming a virtual “antenna”) and a fixed dipole microphone located at a short distance from a sample of the material being tested. In a later post-treatment stage, the data are used to obtain absorption coefficients in diffuse sound field conditions.
In conjunction with the study’s follow-up committee, five typical materials were chosen. These materials were tested in accordance with current standard methods: the reverberation chamber method and the impedance tube method. The relevant intrinsic physical parameters of each material were also measured for the purpose of modelling their acoustic absorption (Johnson-Champoux-Allard parameters: airflow resistivity, tortuosity, porosity, thermal characteristic length and viscous characteristic length). The result of this modelling was then used as a benchmark solution for the absorption coefficient value. The value obtained using the proposed approach was compared with this benchmark solution. Finite element simulations helped with proposing an optimum configuration for the dimensions of the tested material, and the geometry of the source antenna and the dipole microphone.
The results obtained in the lab (in an anechoic chamber) and outside of the lab (in two ordinary rooms, in the presence of reverberation and background noise) confirmed the approach’s potential for measuring the realistic absorption of the various materials tested, generally consistent with the values obtained by numerical simulation. The approach does, however, sometimes produce an erroneous absorption value in the low-frequency range because of the propagation model used at the measurement post-treatment stage. An avenue for improving this model is proposed and partially studied.
ISBN
9782897970147
Mots-clés
Absorption acoustique, Sound absorption, Évaluation du matériel, Evaluation of equipment, Méthodologie, Methodology, Propagation du son, Sound propagation, Surdité, Deafness, Garniture d'insonorisation, Sound absorbing fitting
Numéro de projet IRSST
2014-0006
Numéro de publication IRSST
R-1022
Citation recommandée
Robin, O., Amédin, C. K., Berry, A., Atalla, N., Doutres, O. et Sgard, F. (2018). Méthodologie innovante pour la caractérisation des matériaux acoustiques en laboratoire et étude de son applicabilité sur le terrain (Rapport n° R-1022). IRSST.