Type de document

Rapports de recherche scientifique

Année de publication

2018

Langue

Français

Résumé

L’objectif principal de ce projet était de combiner différents senseurs et instruments pour expérimenter, en laboratoire et sur le terrain, un système de mesures permettant d’estimer quantitativement l’exposition physique des manutentionnaires. Ce type de système pourrait éventuellement servir à évaluer objectivement l’efficacité d’approches de prévention. Un second objectif consistait à mettre au point une stratégie d’échantillonnage pour optimiser la mesure de l’exposition physique de manutentionnaires sur le terrain. Des auteurs ont fréquemment souligné des lacunes dans la manière d’échantillonner les données ce qui a peut-être contribué à affaiblir les études portant sur les relations entre l’exposition physique et les lésions physiques.

Dans la première partie du projet, il fallait déterminer les variables qui contribuent de manière importante à l’exposition physique des manutentionnaires et choisir les instruments de mesures nécessaires. Les variables d’exposition devaient répondre minimalement à deux critères : 1) être reconnues dans la littérature comme ayant un effet significatif sur le risque de blessure du manutentionnaire; 2) pouvoir être mesurées quantitativement sur le terrain. Un grand nombre de variables a pu être répertorié à partir du premier critère, mais seulement un petit nombre a été retenu à partir du second. Ce résultat était attendu en raison des difficultés de mesure sur le terrain, et cela, malgré les avancées technologiques majeures des dernières années. Cependant, il s’avérait essentiel de pouvoir disposer d’un système capable de mesurer la cinématique 3D du corps entier, c’est-à-dire de suivre les mouvements des principaux segments du corps, dont le dos, le bassin, la tête, les bras, les avant-bras, les mains, les cuisses, les jambes et les pieds. Parmi les systèmes les plus récents et prometteurs, on trouve les centrales inertielles (IMU) composées d’accéléromètres, de gyroscopes et de magnétomètres triaxiaux dont les signaux, combinés au moyen d’un filtre numérique de type Kalman, sont capables de déterminer la cinématique 3D d’un segment (déplacement, vélocité et accélération). Le système développé par la compagnie Xsens paraissait particulièrement intéressant et, comme tout instrument de mesure, il fallait, dans un premier temps, s’assurer de sa validité et fidélité dans des conditions de laboratoire et, dans un second temps, il était nécessaire d’expérimenter ce système de mesures en entreprise auprès d’un groupe cible de manutentionnaires.

Les résultats en laboratoire à partir de 12 sujets volontaires (9 masculins, 3 féminins) ont démontré que le système de mesures Xsens, par rapport à un système de mesures étalon (système optoélectronique Optotrak), parvenait à estimer, pendant des tâches de manutention, une majorité des angles articulaires du corps entier à l’intérieur d’un seuil acceptable de 5° d’erreurs. Les centrales inertielles, dans un environnement sans distorsion magnétique, ont donc le potentiel de suivre le mouvement des travailleurs lorsqu’ils effectuent leurs tâches quotidiennes. Par contre, dans un environnement avec perturbations magnétiques qui affectent les données du magnétomètre, les erreurs de mesure augmentent, mais une fois cette perturbation terminée, le niveau d’erreur redevient acceptable après un délai de 30 s. Il est donc conseillé de respecter un délai minimal de 30 s après des perturbations magnétiques avant de considérer les données comme valides.

La deuxième partie du projet consistait à évaluer en entreprise le système de mesures inertiel Xsens auprès de 10 manutentionnaires (9 masculins, 1 féminin) dans le cadre de leur travail régulier. Tous ont manutentionné au minimum une commande de produits (en moyenne 115 produits transférés sur une palette) pendant une durée moyenne de 32 min. Sur le terrain, une comparaison quantitative avec un autre instrument de mesure étalon est difficile, par contre, il est possible de comparer qualitativement les mouvements segmentaires de l’avatar du logiciel de Xsens avec les images du participant captées par caméra. La différence de mouvement entre l’avatar et les images vidéo synchronisées a été observée par un agent de recherche. Sur l’ensemble des observations évaluées (total = 2298 observations), 68 % de celles-ci ont été jugées comme acceptables, c’est-à-dire que l’image vidéo du participant était conforme à celle de l’avatar de Xsens. La majorité des erreurs a été causée par des perturbations magnétiques en provenance du transpalette, mais il demeure qu’il est possible d’effectuer des mesures cinématiques de travailleurs en entreprise avec un niveau d’erreur acceptable. Aussi, lorsque cette cinématique du corps entier est combinée à d’autres informations disponibles dans l’entreprise, comme la liste des commandes sur laquelle le poids des produits manutentionnés est indiqué, il est alors possible d’estimer le chargement au dos. L’ensemble de ces mesures rend maintenant possible l’estimation de l’exposition physique des manutentionnaires.

Pour répondre au second objectif, une stratégie d’échantillonnage a été élaborée. Celle-ci sera utile pour optimiser les prochaines collectes et s’assurer d’un échantillonnage adéquat. Des compromis devront toutefois être faits entre l’obtention de données d’une très grande précision (avec le nombre de sujets prescrits) et ce que la réalité en matière de coûts-bénéfices permet de réaliser sur le terrain.

Les perspectives d’utilisation de ce type d’instrument de mesure sont nombreuses. Il sera possible, par exemple, de quantifier les effets d’une intervention ergonomique qui vise une réduction de l’exposition physique. Des travailleurs novices en formation pourraient ainsi recevoir des rétroactions sur leur façon de réaliser leurs tâches et être suivi dans leur parcours de formation. Finalement, il deviendra plus facile de quantifier la dose-réponse pour soutenir l’élaboration de nouvelles normes sécuritaires.

Abstract

The main objective of this project was to develop a measurement system consisting of various sensors and instruments for quantitative assessment of the physical exposure of manual materials handlers, and to test it in the laboratory and in the field. Such a system could be used to determine the efficacy of different prevention methods. A second objective was to develop a sampling strategy to optimize the field measurement of handlers’ physical exposure. Many authors have criticized the shortcomings in data sampling methods, which have perhaps weakened the credibility of studies on the correlation between physical exposure and physical injuries.

In the first part of the project, the task was to determine the variables contributing significantly to physical exposure and to select the appropriate instrumentation. Exposure variables had to meet at least two criteria: (1) be recognized in the literature as having a significant effect on handlers’ risk of injury; (2) be able to be measured quantitatively in the field. A large number of variables met the first criterion, but only a few met the second one. This was to be expected, given the difficulties involved in field measurement in spite of recent major technological advances. It was found essential to have a system capable of measuring the 3D kinematics of the entire body, i.e., tracking the movements of the main segments—back, pelvis, head, arms, forearms, hands, thighs, legs and feet. Promising systems that have emerged recently include IMUs (inertial measurement units) made up of triaxial accelerometers, gyroscopes and magnetometers whose signals, combined by means of a Kalman digital filter, are able to determine the 3D kinematics (motion, velocity and acceleration) of a segment. Such a system, developed by Xsens Technologies, appeared particularly promising; however, like any instrument, its validity and reliability first had to be checked under laboratory conditions, and secondly it had to be tested in the field on a target group of materials handlers.

Laboratory trials on 12 volunteers (9 men, 3 women) showed that the Xsens system was able to estimate most of the joint angles for the entire body during handling tasks to within a very acceptable 5° error margin against the benchmark measurement system (an Optotrak optoelectronic system). IMUs are therefore potentially capable of tracking worker motion during daily tasks, at least in an environment free of magnetic distortion. If the magnetometer data are affected by magnetic disturbance, the error increases but returns to an acceptable level 30 s after the disturbance ceases. Before the data can be considered valid, a minimum 30 s delay should therefore be allowed after any magnetic disturbance.

The second part of the project consisted in field testing of the Xsens inertial measurement system on 10 handlers (9 men, 1 women) during their regular tasks. All the subjects handled at least one order (average 115 products transferred onto a pallet) for an average of 32 min. In the field, quantitative comparison with a benchmark instrument is difficult. Nevertheless, a qualitative comparison can be made between the segment motion of the Xsens avatar and the actual subject images recorded with a video camera. The differences between the avatar’s movements and the synchronized video images were observed by a researcher. Of all the observations assessed (total = 2,298 observations), 68% were judged acceptable, that is, the video image of the subject matched the image of the Xsens avatar. Most of the errors were caused by magnetic disturbances from the forklift, but it is still possible to measure worker kinematics in the field with an acceptable error level. Moreover, when full-body kinematics is combined with other information available in the workplace, such as the order list showing the weights of the products handled, loading on the back can be calculated. All these data, taken together, now make it possible to estimate the physical exposure of materials handlers.

To meet the second objective, a sampling strategy was developed. This will prove useful for optimizing future data collection tasks and ensuring good sampling. However, compromises will be necessary between very high precision (with the number of prescribed subjects) and field realities in terms of cost/benefit.

There are numerous potential uses for this type of system. For example, it will be possible to quantify the efficacy of an ergonomic intervention designed to reduce physical exposure. Novice handlers be monitored during their training period and receive feedback on their work methods. Finally, it will be easier to quantify dose-effect curves to support the development of new occupational safety standards.

ISBN

9782896319886

Mots-clés

Manutention manuelle, Manual handling, Mesure du travail et de l'effort, Measurement of work and effort, Mécanique humaine, Body mechanics, Soulèvement des charges, Manual lifting, Instrument de mesure, Measuring instrument, Technique d'échantillonnage, Sampling method, Évaluation de l'exposition, Exposure evaluation

Numéro de projet IRSST

2012-0040

Numéro de publication IRSST

R-1005

Partager

COinS