Type de document

Rapports de recherche scientifique

Année de publication

2014

Langue

Français

Édition

2e éd.

Résumé

Les nanotechnologies présentent aujourd’hui des enjeux majeurs en termes technologique, économique, éthique, social et environnemental, car elles offrent le potentiel d’améliorer de façon substantielle les propriétés de multiples produits dans tous les secteurs d’activité tant en matière de production de matériaux aux performances inédites que de diagnostic et de traitement médical. Les nanomatériaux favorisent ainsi l’émergence de nouveaux marchés, la création d’emplois, l’amélioration de la qualité de vie et peuvent contribuer à la protection de l’environnement. Du reste, l’impact se fait déjà sentir dans des secteurs aussi diversifiés que l’agroalimentaire, l’aérospatiale, la cosmétique, la construction et la santé. Au Québec, la plupart des universités de même que plusieurs centres de recherche œuvrent à la conception de nouvelles applications. Plusieurs entreprises sont en phase de démarrage, en exploitation, produisent ou incorporent déjà des nanomatériaux dans leurs procédés afin d’améliorer la performance de leurs produits et la tendance devrait s’accentuer au cours des prochaines années. Le personnel des laboratoires de recherche et des industries est donc particulièrement concerné par ces nouveaux développements susceptibles d’exposer un nombre croissant de travailleurs à ces matériaux du monde de l’infiniment petit. On estime qu’en 2015, au niveau mondial, 10 % des emplois manufacturés pourraient être liés aux nanotechnologies et plus de 2 000 produits commercialisés contiendraient des nanomatériaux.

La manipulation de ces nouveaux matériaux aux propriétés uniques soulève toutefois de nombreuses interrogations et génère des inquiétudes en raison de l’état fragmentaire des connaissances sur les risques pour la santé, la sécurité des travailleurs et l’environnement. Or, plusieurs études ont déjà démontré que certains nanomatériaux ont une toxicité spécifique différente des mêmes produits chimiques de plus forte taille. Les nanomatériaux peuvent être absorbés principalement par inhalation, mais également par voie cutanée ou digestive; en outre, des études sur des animaux ont mis en évidence que certains nanomatériaux peuvent se rendre au sang par translocation et s’accumuler dans divers organes. Parmi les multiples effets spécifiques documentés, notons que des études animales ont laissé voir qu’à masse égale, certains nanomatériaux causent plus d’inflammation et de tumeurs pulmonaires que les mêmes produits à plus forte taille. La recherche a permis de déterminer que les caractéristiques physico-chimiques des nanomatériaux telles la taille, la forme, la surface spécifique, la charge, la solubilité et les propriétés de surface jouent un rôle important quant à leurs effets sur les systèmes biologiques, incluant leur capacité de générer un stress oxydatif. Il est donc important d’évaluer et de maîtriser les risques potentiels afin d’assurer une manipulation sécuritaire des nanomatériaux. Tout comme pour plusieurs autres substances chimiques, une approche d’estimation et de gestion des risques doit être développée au cas par cas.

Par ailleurs, il n’existe pas encore de méthode de mesure qui fasse consensus pour caractériser l’exposition des travailleurs aux nanomatériaux, rendant ainsi l’évaluation quantitative des risques difficile, voire impossible dans de multiples situations. Dans un tel contexte d’incertitudes, une approche de précaution est préconisée afin de minimiser l’exposition du travailleur. Or, au Québec, la responsabilité de fournir un milieu de travail sécuritaire relève des employeurs et les mesures préventives doivent être appliquées par les employés. Il importe donc, dans tous les milieux de travail où des nanomatériaux sont manipulés, de développer un programme de prévention qui tienne compte des caractéristiques spécifiques des nanomatériaux afin de mettre en place de bonnes pratiques de travail et d’instaurer des procédures de prévention adaptées aux risques propres à chaque situation de travail.

Heureusement, les connaissances scientifiques actuelles, même si elles demeurent partielles, permettent d’identifier, d’estimer et de gérer efficacement ces risques. Dans l’intention de soutenir le développement sécuritaire des nanotechnologies au Québec, le présent guide souhaite rassembler les connaissances scientifiques actuelles sur l’identification des dangers, les stratégies d’évaluation du niveau de nanomatériaux retrouvés dans différents milieux de travail, l’évaluation des risques et finalement l’application de différentes approches à la gestion des risques. Ce guide, dont l’utilisation optimale requiert un minimum de connaissances en hygiène du travail, est destiné à soutenir l’ensemble des milieux de travail qui fabriquent ou utilisent des nanomatériaux et à fournir des informations pratiques et des outils de prévention permettant leur manipulation sécuritaire aussi bien dans les laboratoires et les usines pilotes que dans les industries de production ou d’intégration de ces produits.

Pour être efficace, la gestion des risques doit faire partie intégrante de la culture d’une organisation et les questions de santé et de sécurité doivent être considérées dès la conception des lieux de travail, sinon le plus en amont possible. Ceci est un élément clé de la bonne gouvernance organisationnelle. En pratique, la gestion des risques constitue un procédé itératif à effectuer à travers une démarche structurée qui induit des améliorations continues dans la prise de décisions et peut même favoriser l’accroissement de la performance. Ce document vise à faciliter la mise en œuvre d’une telle démarche qui sera toutefois circonscrite à la prévention des risques liés aux nanomatériaux. En effet, selon le procédé impliqué, plusieurs autres risques associés à l’exposition aux solvants, aux gaz, à des contraintes thermiques ou ergonomiques, etc. pourraient être présents, mais ils ne seront pas examinés ici.

Les auteurs favorisent une approche de prévention visant à minimiser l’exposition professionnelle aux nanomatériaux. Considérant les différentes voies d’exposition et les facteurs pouvant influencer la toxicité des nanomatériaux, de même que les risques pour la sécurité, l’approche retenue se base essentiellement sur l’identification des dangers, sur différentes stratégies d’évaluation des risques et sur une hiérarchie de moyens de maîtrise, en y intégrant les connaissances spécifiques aux nanomatériaux lorsque celles-ci sont disponibles. L’évaluation adéquate des risques doit conduire au choix des procédés, des équipements et des méthodes de travail à même de réduire l’exposition potentielle des travailleurs notamment en maîtrisant à la source les émissions de nanomatériaux. Elle doit également permettre de sélectionner les mesures de prévention collectives et individuelles et de déterminer les éléments de gestion administrative et de formation requis pour assurer la protection adéquate de l’ensemble des travailleurs, aussi bien sur le plan de l’entretien des équipements et des espaces de travail qu’au regard des opérateurs.

Cette seconde version du guide a été enrichie des données récentes de la littérature scientifique. De plus, quelques annexes présentent des interventions effectuées dans des milieux de travail québécois, des exemples de situations à risques tirés de la littérature, des mesures de prévention, des données relatives à l’efficacité de ces diverses mesures, de même que l’implantation des moyens de maîtrise de l’exposition. Notons finalement que les solutions à retenir pour un milieu de travail spécifique doivent être traitées au cas par cas et adaptées à chaque situation en tenant compte des risques évalués pour chacun des postes de travail.

Abstract

Today’s nanotechnologies can substantially improve the properties of a wide range of products in all sectors of activity, from the manufacture of materials with ground-breaking performance to medical diagnostics and treatment—yet they raise major technological, economic, ethical, social and environmental questions. Some of the spinoffs we can expect include the emergence of new markets, job creation, improvements in quality of life and contributions to protection of the environment. The impact of nanotechnologies is already being felt in sectors as diverse as agroprocessing, cosmetics, construction, healthcare and the aerospace industry. Most universities in Québec and many research centres are working to design new applications. Many companies have projects in the start-up phase, while others are already producing nanomaterials or have incorporated them in their processes to improve product performance, a trend expected to accelerate over the coming years. These new developments, which could mean exposure of a growing number of workers to these infinitesimally small particles, are of particular concern to workers in industry and staff in research laboratories. It is estimated that in 2015 about 10% of manufacturing jobs worldwide will be associated with nanotechnologies, and more than 2,000 commercial products will contain nanomaterials.

Given our fragmentary knowledge of the health and safety risks for workers and the environment, the handling of these new materials with their unique properties raises many questions and concerns. In fact, many studies have already demonstrated that the toxicity of certain nanomaterials differs from that of their bulk counterparts of the same chemical composition. Nanomaterials enter the body mainly through inhalation but also through the skin and the GI tract. Animal studies have demonstrated that certain nanomaterials can enter the blood stream through translocation and accumulate in different organs. Animal studies also show that certain nanomaterials cause more inflammation and more lung tumours on a mass-for-mass basis than the same substances in bulk form, among many other specific effects documented. In addition, research has shown that the physicochemical characteristics of nanomaterials (size, shape, specific surface area, charge, solubility and surface properties) play a major role in their impact on biological systems, including their ability to generate oxidative stress. It is thus crucial that risks be assessed and controlled to ensure the safe handling of nanomaterials. As with many other chemicals, a risk assessment and management approach must be developed on a case-by-case basis.

There is still no consensus, however, on a measurement method for characterizing occupational exposure to nanomaterials, making quantitative risk assessment difficult if not impossible in many situations. As a result, a precautionary approach is recommended to minimize worker exposure. In Québec, the employer is responsible for providing a safe work environment, and preventive measures must be applied by employees. Accordingly, preventive programs that take into account the specific characteristics of nanomaterials must be developed in all work environments where nanomaterials are handled, so that good work practices can be established and preventive procedures tailored to the risks of the particular work situation can be introduced.

Fortunately, current scientific knowledge, though partial, makes it possible to identify, assess and effectively manage these risks. This best practices guide is meant to support the safe development of nanotechnologies in Québec by bringing together current scientific knowledge on hazard identification, strategies for determining nanomaterial levels in different work environments, risk assessment and the application of various risk management approaches. Some knowledge of occupational hygiene is required to use this guide effectively. Designed for all work environments that manufacture or use nanomaterials, this guide provides practical information and prevention tools for the safe handling of nanomaterials in laboratories and pilot plants as well as industrial facilities that produce or incorporate them. To be effective, risk management must be an integral part of an organization’s culture, and health and safety issues must be considered when designing the workplace or as far upstream as possible. This is crucial for good organizational governance. In practice, risk management is an iterative process implemented as part of a structured approach that fosters continuous improvement in decision-making and can even promote better performance. The purpose of this guide is to contribute to the implementation of such an approach to the prevention of nanomaterial-related risks only. Depending on the process, other risks (associated with exposure to solvents, gas, heat stress, ergonomic stress, etc.) may be present, but they are not addressed in this guide.

The authors recommend a preventive approach designed to minimize occupational exposure to nanomaterials. Given the different exposure pathways, the many factors that can affect nanomaterial toxicity and the health risks, our approach is essentially based on hazard identification, different risk assessment strategies and a hierarchy of control measures, incorporating knowledge specific to nanomaterials when available. Risk assessment makes it possible to select processes, equipment and work methods that reduce occupational exposure, in particular by controlling nanomaterial emissions at the source. It also makes it possible to select collective and individual preventive measures and to determine administrative management measures and training needed to protect all workers—operators as well as those who maintain equipment and workspaces.

This second edition incorporates new information in the scientific literature. In addition, appendices have been included describing initiatives in Québec workplaces; examples of at-risk situations described in the literature; preventive measures and data on their relative efficacy; and the implementation of measures to control exposure. Finally, we note that solutions for any particular workplace must be developed on a case-by-case basis taking into account the risk assessment of each workstation.

ISBN

9782896317523

Mots-clés

Nanomatériaux, Nanomaterials, Critère de risque, Hazard criteria, Gestion du risque, Risk management, Technique de prévention, Safety and health engineering, Équipement de protection individuelle, Personal protective equipment, Évaluation de l'exposition, Exposure evaluation, Québec

Numéro de projet IRSST

0099-9150

Numéro de publication IRSST

R-840

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