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Portraits statistiques

Année de publication

2017

Langue

Français

Résumé

En 2012, les lésions professionnelles avec atteinte permanente à l’intégrité physique ou psychique (APIPP) constituaient 12 % de tous les accidents traumatiques (AT) et des troubles musculosquelettiques (TMS) acceptés, mais elles ont occasionné la moitié des jours indemnisés et des débours versés par la CNESST pour ces types de lésions. Pourtant, les connaissances relatives aux groupes de travailleurs les plus à risque de subir ce type de lésions au Québec demeurent limitées de même que pour les facteurs associés à ce risque.

Cette étude vise à identifier, en s’appuyant sur les données de la période 2010-2012, les sous-groupes de travailleurs dont le risque de subir un AT ou un TMS avec APIPP est le plus élevé et à analyser, pour la période 2003-2012, l’évolution temporelle de ce risque au sein de divers sous-groupes. Les analyses sont effectuées selon l’âge, le sexe, la catégorie professionnelle et l’industrie. L’étude permet aussi de déterminer, parmi les 4 facteurs analysés, ceux qui sont les plus fortement associés à la survenue d’une APIPP, en contrôlant l’effet des autres variables analysées.

Le risque est estimé à partir de taux de fréquence en équivalent temps complet (ETC). Ceux-ci sont calculés en rapportant les AT et TMS avec APIPP acceptés par la Commission des normes, de l’équité, de la santé et de la sécurité du travail (CNESST) aux effectifs de travailleurs ETC estimés à l’aide des données de l’Enquête nationale auprès des ménages (ENM) pour la période 2010-2012 et celles de l’Enquête sur la population active (EPA) pour les analyses portant sur la période 2003-2012.

Pour l’analyse de la situation récente (2010-2012), l’équipe de recherche a eu recours à des modèles de régression binomiale négative afin d’évaluer les associations entre le taux de fréquence ETC et le groupe d’âge, le sexe, la catégorie professionnelle et l’industrie. L’effet associé à chaque variable indépendante est présenté sous forme d’un risque relatif (RR), mesuré en utilisant les rapports de taux de fréquence. Toutes ces analyses sont effectuées séparément pour les AT et pour les TMS avec APIPP.

En 2010-2012, les analyses selon l’âge font ressortir que les travailleurs de 55 ans ou plus ont un taux de fréquence ETC d’AT acceptés avec APIPP 2 fois supérieur à celui des 15-24 ans. Cette association entre le groupe d’âge et le taux de fréquence ETC diffère toutefois de manière statistiquement significative selon le sexe. Ainsi, chez les femmes le RR des 55 ans ou plus par rapport aux 15-24 ans est supérieur à 3, alors qu’il est inférieur à 2 chez les hommes. Cette augmentation du risque selon l’âge prévaut également pour les TMS acceptés avec APIPP, mais l’effet est amplifié alors que les plus âgés présentent un RR supérieur à 6 par rapport au 15-24 ans. En ce qui concerne le risque de TMS selon l’âge, il n’y a pas de différences significatives entre les 2 sexes.

L’analyse selon le sexe indique que le risque d’AT avec APIPP des femmes représente 76 % de celui des hommes en 2010-2012. Cependant, cette différence de risque entre les femmes et les hommes varie en fonction du groupe d’âge, de la catégorie professionnelle et de l’industrie. Concernant l’effet du sexe en fonction du groupe d’âge, il ressort de cette analyse que le risque des femmes de 15-24 ans équivaut à la moitié de celui des jeunes hommes, alors qu’aucune différence statistiquement significative entre les sexes n’est mesurée chez les 55 ans ou plus. Notons également l’absence d’écart statistiquement significatif entre hommes et femmes parmi les travailleurs non manuels et la majorité des industries productrices de services, alors que les autres catégories professionnelles et industries montrent un risque statistiquement supérieur pour les hommes. En ce qui a trait au risque de TMS avec APIPP, il n’y a globalement aucune différence statistiquement significative entre hommes et femmes. Toutefois, l’effet du sexe fluctue en fonction de l’industrie. Dans deux industries productrices de biens, le risque des femmes est statistiquement inférieur à celui des hommes, alors qu’il est supérieur dans deux industries productrices de services.

La catégorie professionnelle est la variable indépendante dont l’effet associé au taux de fréquence ETC est le plus fort, autant pour les AT que les TMS acceptés, en 2010-2012. Pour les AT, par rapport à la catégorie non manuel, le RR des travailleurs manuels est d’environ 9 et de 4 pour ceux de la catégorie mixte. En ce qui a trait aux TMS, ces risques relatifs sont respectivement de 13 pour les manuels et de 4 pour les professions mixtes. Ces RR diffèrent selon l’industrie autant pour les AT que les TMS, mais dans chaque industrie le RR des manuels est le plus élevé suivi de celui des mixtes, et tous sont différents de manière statistiquement significative par rapport aux travailleurs non manuels.

Le RR lié à l’industrie varie environ du simple au double entre nos 9 regroupements d’industries, tant pour le risque d’AT que pour celui de TMS acceptés en 2010-2012. Pour les AT, aucune industrie ne présente un risque statistiquement supérieur à celui de la fabrication et services de réparation et entretien, la catégorie de référence pour la variable industrie. Sur le plan des TMS cependant, les soins de santé et assistance sociale sont la seule industrie dont le risque est supérieur à celui de la fabrication et services de réparation et entretien de manière statistiquement significative (RR=1,4). Enfin, notons que le sexe et la catégorie professionnelle sont des variables modificatrices de l’effet de l’industrie, et ce, autant pour les AT que les TMS.

Par ailleurs, l’étude a aussi permis d’identifier 23 industries-catégories professionnelles chez les hommes, 22 chez les femmes, dont le taux de fréquence ETC des AT acceptés avec APIPP est deux fois supérieur au taux moyen de 2010-2012 (hommes : 3,8 ‰; femmes : 1,5 ‰). Ils regroupent 17 % des travailleurs, mais 48 % des AT avec APIPP pour les hommes alors que ces proportions sont de 12 % et 39 % pour les femmes.

En ce qui concerne le taux de fréquence ETC des TMS acceptés avec APIPP, 18 industries-catégories professionnelles pour les hommes, 9 pour les femmes, ont un taux deux fois supérieur au taux moyen de 2010-2012 (hommes : 1,4 ‰; femmes : 0,9 ‰). Ces industries-catégories professionnelles correspondent à 16 % des travailleurs et 45 % des TMS avec APIPP pour les hommes. Ces proportions sont de 8 % et 37 % pour les femmes.

L’analyse de l’évolution de 2003 à 2012 des taux de fréquence ETC repose également sur la régression binomiale négative. Il ressort que le taux de fréquence ETC a diminué, en moyenne annuelle, de 4,1 % pour les AT et de 5,4 % pour les TMS. Cette différence est statistiquement significative. Cette diminution a été moins importante pour les travailleurs les plus âgés, les femmes et les non manuels; les différences sont statistiquement significatives. Toutefois, dans le cas des TMS, la diminution a été moins grande pour les hommes, mais la différence avec les femmes n’est pas statistiquement significative. Nous avons aussi déterminé 9 industries pour les AT et 6 industries pour les TMS, qui ont eu des évolutions moins favorables statistiquement différentes de l’industrie ayant enregistré la plus forte diminution de son taux de fréquence ETC.

Enfin, les modifications au tissu industriel et, dans une moindre mesure, les changements démographiques survenus entre 2003 et 2012 semblent avoir contribué à accélérer la diminution du taux de fréquence ETC global d’AT acceptés avec APIPP. En matière de TMS, les changements industriels et démographiques semblent avoir provoqué des effets contraires (les premiers accélérant la diminution et les seconds la freinant) qui se sont pratiquement annulés.

Abstract

In 2012, employment injuries with permanent physical or mental impairment (PPMI) constituted 12% of all traumatic accidents (TA) and musculoskeletal disorders (MSD) accepted, but they resulted in 50% of days compensated and disbursements made by the CNESST for these types of injuries. Yet there is limited knowledge about the groups of workers who are at the greatest risk of incurring this type of injury in Québec and the associated factors.

Using data from 2010–2012, this study aimed to identify the subgroups of workers with the highest risk of suffering a TA or MSD with PPMI, and to analyze the temporal evolution of this risk among various subgroups, from 2003 to 2012. Analyses were performed according to age, gender, occupational category and industry. The study also made it possible to determine, among the 4 factors analyzed, those that are the most strongly associated with the advent of a PPMI, by controlling the effect of the other variables analyzed.

The risk was estimated using full-time equivalent (FTE) frequency rates. These were calculated by dividing the number of TA and MSD with PPMI accepted by the Commission des normes, de l’équité, de la santé et de la sécurité du travail (CNESST) with the numbers of FTE workers, using data from the National Household Survey (NHS) between 2010 and 2012 and those of the Labour Force Survey (LFS) for analyses performed between 2003 and 2012.

For the analysis of recent data (2010–2012), the research team used negative binomial regression models to evaluate the associations between the FTE frequency rate and age group, gender, occupational category and industry. The effect associated with each independent variable is presented in the form of relative risk (RR), measured by using frequency rate reports. All these analyses were carried out separately for the TA and for the MSD with PPMI.

In 2010–2012, analyses based on age revealed that workers aged 55 or over have an FTE frequency rate of accepted TA with PPMI that is twice as high as those aged 15 to 24. This association between age group and FTE frequency rate differs in a statistically significant manner depending on gender. For instance, among women, the RR of those aged 55 or over compared to those aged 15 to 24 is over 3, while it is below 2 among men. This increase in risk according to age also holds true for accepted MSD with PPMI, but the effect is amplified when the oldest workers have an RR above 6 compared to those aged between 15 and 24. With respect to the MSD risk according to age, there are no significant differences between the 2 genders.

The gender-based analysis indicates that the risk of TA with PPMI among women is 76% of that of men in 2010–2012. However, this difference in risk between men and women varies according to age group, occupational category and industry. With regard to the effect of gender as it relates to age group, the analysis found that the risk faced by women aged 15 to 24 is equivalent to half of that faced by young men, while no statistically significant difference was noted between genders among those aged 55 and over. There is also no statistically significant gap between men and women among non-manual workers in the majority of service industries, while in other occupational categories and industries there is statistically higher risk among men. With respect to risk of MSD with PPMI, overall, there is no statistically significant difference between men and women. However, the effect of gender varies according to the industry. In 2 goods-producing industries, women’s risk is statistically lower than that of men, while it is higher in 2 service industries.

The occupational category was the independent variable with the strongest effect associated with FTE frequency rates, for both accepted TA and MSD, between 2010 and 2012. For TA, compared to the non-manual category, the RR of manual workers is approximately 9, and 4 for those in the mixed category. With respect to MSD, relative risks are 13 for manual workers and 4 for mixed occupations. These RR differ according to the industry for both TA and MSD, but in each industry, the RR of manual workers is the highest, followed by those in mixed occupations, and all are significantly different statistically when compared with non-manual workers.

Industry-related RR sometimes varies by a factor of 2 among the 9 groups of industries, for both the risks of TA and MSD accepted in 2010–2012. For TA, no industry has a statistically higher risk than that of manufacturing and repair and maintenance services, the reference category for the industry variable. With respect to MSD, however, health and social assistance services are the only industries in which the risk is significantly higher statistically than that of manufacturing and repair, and maintenance services (RR equals 1.4). In addition, gender and the occupational category are variables modifying the effect of industry for both TA and MSD.

The study also made it possible to identify 23 industries/occupational categories among men, and 22 among women, for which the FTE frequency of TA accepted with PPMI is twice as high as the average rate in 2010–2012 (men: 3.8‰; women: 1.5‰). They include 17% of workers, but 48% of TA with PPMI for men, while the proportions are 12% and 39%, respectively, for women.

With respect to FTE frequency rates of MSD accepted with PPMI, 18 industries/occupational categories for men, and 9 for women, have a rate that is twice as high as the average rate in 2010–2012 (men: 1.4‰; women: 0.9‰). These industries/occupational categories correspond to 16% of workers and 45% of MSD with PPMI for men. Those proportions are 8% and 37%, respectively, for women.

The analysis of changes in FTE frequency rates between 2003 and 2012 is also based on negative binomial regression. It appears that the average annual FTE frequency rate has decreased by 4.1% for TA and 5.4% for MSD. This difference is statistically significant. The decrease was not as substantial among older workers, women and non-manual workers; the differences are statistically significant. However, in the case of MSD, the decrease was less for men, but the difference with women is not statistically significant. We also determined 9 industries for the TA and 6 industries for the MSD in which the changes were less favourable and statistically different than the industry with the greatest decrease in its FTC frequency rate.

Finally, changes to the composition of Québec’s industrial sector and, to a lesser extent, demographic changes between 2003 and 2012, appear to have contributed to accelerating the decrease in the overall FTC frequency rate of TA accepted with PPMI. With regard to MSD, industrial and demographic changes appear to have opposing effects (the first accelerating the decrease and the second slowing it down), which, to all intents and purposes, cancel each other out.

ISBN

9782896319527

Mots-clés

Invalidité de longue durée, Long-term disability, Différence liée à l'âge, Age difference, Différence liée au sexe, Sex difference, Taux de fréquence, Frequency rate, Relation profession-maladie, Occupation-disease relation, Pathologie professionnelle, Occupational pathology, Analyse par comparaison, Comparative analysis, Risque d'atteinte à la santé, Health hazard, Québec

Numéro de projet IRSST

2014-0014

Numéro de publication IRSST

R-976

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